Betty – Arnaldur Indridason

Héhé … cela faisait longtemps que je n’avais pas lu un roman d’Arnaldur Indridason
Je m’étais un peu lassée des aventures d’Erlundur (des aventures que je trouvais intéressantes mais un peu toujours sur le même modèle)
J’ai donc choisi ce livre en connaissance de cause : Erlundur n’apparaît pas du tout.
A la place, le lecteur se met dans la peau du narrateur qui écrit l’histoire de sa cellule : on ne tarde pas à savoir qu’un homme est mort, que sa femme est la fameuse Betty du titre et que le personnage principal, raide dingue de Betty croupit en prison en clamant son innocence …
Alors affabulation ? mensonges ? manipulations ? complicité de meurtre? jalousie ?
J’ai trouvé ce roman très bien fait, il m’a tenu en haleine, je n’ai pas vu arriver une seconde LE TOURNANT de l’histoire. Il a lieu au milieu du livre et j’ai failli redémarrer le livre au début pour voir si j’aurais pu deviner LE TRUC . Et puis non, il était déjà 22h et j’avais boulot le lendemain alors j’ai poursuivi pour finir le livre … et je me suis traînée au boulot le lendemain … lire « juskàpludheure » c’est plus de mon âge, mais quelle histoire bien ficelée…Héhé …

Bref, suspense au rendez vous !

Un extrait :

Je pense parfois que sans doute je retomberais encore dans le panneau, si seulement j’en avais l’occasion. Ils sont très corrects envers moi, ici. Je n’ai ni journaux, ni radio, ni télévision, comme ça je n’ai pas les informations. Je ne reçois pas non plus de visites. Mon avocat vient me voir de temps en temps, le plus souvent pour me dire qu’il n’y a aucun espoir en vue. Je ne le connais pas bien. Il a une grande expérience, mais il reconnaît lui-même que ce procès risque de le dépasser. Il a parlé avec les femmes dont j’ai trouvé l’adresse, pensant qu’elles pourraient m’aider, mais il dit que c’est plus que douteux. Dans tout ce dont elles peuvent témoigner, très peu de choses concernent l’affaire elle-même.
J’ai demandé un stylo et quelques feuilles de papier. Le pire, dans cet endroit, c’est le calme. Il règne un silence qui m’enveloppe comme une couverture épaisse. Tout est réglé comme du papier à musique. Ils m’apportent à manger à heure fixe. Je prends une douche tous les jours. Ensuite, il y a les interrogatoires. Ils éteignent la lumière pendant la nuit. C’est là que je me sens le plus mal. Dans l’obscurité avec toutes ces pensées. Je m’en veux terriblement d’avoir permis qu’on m’utilise. J’aurais dû le prévoir.
J’aurais dû le prévoir.
Et pendant la nuit, dans l’obscurité, voilà que le désir fou, le désir fou de la revoir m’envahit. Si seulement je pouvais la revoir une fois encore. Si seulement nous pouvions être ensemble, ne serait-ce qu’une fois encore.
Malgré tout.

Challenge « lire sous la contrainte  » chez Philippe où la contrainte est « Devinez qui j’ai rencontré ?  »

Challenge Le mois du Polar chez Sharon

Challenge Petit bac 2019 Enna pour la catégorie « prénom »

Asta – Jon Kalman Stefansson

Ce livre est l’histoire d’Asta, née dans les années 1950 à Reykjavík, mais pas seulement : c’est aussi l’histoire d’Helga la mère d’Asta, de Zigvaldi le père, de Josef…..

Le livre débute avec une scène d’amour fou entre Helga et Zigvaldi. Dans le deuxième chapitre, on apprend sans transition que les parents se sont séparés peu après cette scène et qu’Asta a 20 ans.

La construction en aller-retour dans le temps m’a un peu déroutée mais c’est un parti pris de l’auteur : en effet, l’histoire est racontée essentiellement du point de vue de Zigvaldi,  celui-ci vient de tomber d’une échelle et  il repense à sa vie et à celle d’Asta.  Par conséquent, comme il est blessé très gravement, son histoire n’est pas pas du tout racontée dans l’ordre chronologique mais dans l’ordre où ses souvenirs lui arrivent : un jour Asta a deux ans,  on la retrouve dans les pages suivantes à 40 ans puis à 20 ans avec une petite fille Sonesja, puis à 17 ans à nouveau.
Au début ce va et vient temporel m’a gênée car j’avais envie de savoir ce que devenait Asta quand elle est adolescente. A 17 ans c’est une jeune fille rebelle et elle est envoyée dans une ferme dans le nord de l’Islande, une sorte de « punition » pour son comportement quelque peu violent.

Plus tard, je me suis laissée aller et emporter par l’histoire d’Asta sans plus faire attention aux changements d’époque sans transition. Asta  se livre également dans quelques chapitres où on lit des lettres à son « amour » (dont on ne connaîtra pas le nom, on peut juste deviner (ou pas)).

Ce livre met en scène Asta et ses relations avec les hommes : En particulier le tendre et mystérieux Joseph qui sera dans le même ferme l’été de leurs 17 ans. Petit à petit on va découvrir ce qui est arrivé  et pourquoi elle a laissé sa fille à la charge de son père et sa belle-mère.
C’est  un roman aussi très dur sur les choix de vie que l’on prend à un moment et qui font totalement basculer une vie  en un clin d’œil.

Un passage m’a fortement marqué : celui où la mère d’Asta, Helga profite de sa ressemblance avec Elizabeth Taylor pour faire croire à sa belle-mère que la photo d’Elizabeth Taylor qu’elle a chez elle est une photo d’elle-même (difficile d’être une femme au foyer en Islande dans les années 50 quand on voit – ou croit voir- une vie idéale sur grand écran).

En conclusion : un livre déroutant mais très intéressant une fois que j’ai accepté de me laisser guider par les souvenirs de Sigvaldi…

* *

À ce moment-là, Asta, le fermier et la Land-Rover ont enfin quitté le fjord. Le paysan a allumé la radio, il tourne le bouton dans l’espoir de mieux capter les émissions, mais ce n’est pas concluant. C’est à peine s’ils distinguent les mots à travers les grésillements. On dirait qu’ils sont sur une route menant hors du monde. Mais bon, on ne peut plus parler de route, c’est à peine une piste, à peine un sentier. Les grandes mains puissantes du fermier s’agrippe au volant, la voiture se perd en ruades comme un cheval fou. Asta est si pâle que le fermier s’arrête, elle a tout juste le temps de descendre du véhicule avant de vomir sur une touffe d’herbe printanière qui perce à travers la neige, mais elle n’a plus rien à vomir, elle a l’estomac vide depuis longtemps comme en atteste le sac sur le plancher de la vie. Puis ils se remettent en route, en entrant dans un autre fjord, si ce n’est qu’Asta marche par intermittence à côté de la voiture tandis que, secoué dans tous les sens en passant sur les touffes d’herbe, les plaques de neige et les cailloux, le fermier se cramponne de toutes ses forces au volant. (Page 68)

 

Livre lu dans le cadre des Matchs de la rentrée littéraire organisée par Rakuten 

Du même auteur, j’avais aimé cette trilogie

#Asta  #Jon Kalman Stefansson #MRL18 #rakuten

 

 

Les nuits de Reykjavik – Arnaldur Indridason

nuits Reykjavik

Après « la femme en vert » lu il y a deux ans, j’ai eu envie de replonger avec Erlundur, policier en Islande, dans le dernier opus de l’auteur.
J’ai été surprise au début car le héros policier a 28 ans alors que dans la femme en vert il a une cinquantaine d’année et une fille adulte.
Le premier effet de surprise passé, (c’est bien le dernier roman de l’auteur mais celui-ci a choisi de revenir sur les débuts d’Erlundur dans la police), j’ai suivi avec  intérêt la démarche d’Erlundur dans son enquête. Il travaille dans la police de proximité (faire la circulation en cas d’accident, se rendre sur place en cas de tapage nocturne, faire face à des hommes qui battent leur femme, gérer les nuits où tout  peut déraper pour cause d’alcool).

Sur son temps libre, il enquête sur la noyade (accidentelle?) d’un clochard à qui il avait parlé quelques jours avant sa mort …

Etait-ce le remords qui poussait ainsi Erlendur à vouloir exhumer cette histoire ? Aurait-il pu faire plus pour cet homme même s’il refusait toute forme d’aide et de compassion ? Personne ne s’était alarmé de voir un vagabond au bout du rouleau rendre son dernier souffle. Finalement, ça faisait un clochard de moins en ville. Seul Erlendur s’intéressait au sort de cet homme, mort noyé comme un chien errant.

Les réflexions d’Erlundur sur ses contemporains sont intéressantes dans ce roman  … Erlundur dans sa vie professionnelle est capable de beaucoup d’empathie (avec la soeur du défunt par exemple) et il est totalement dépourvu de sentiments dans sa vie privée (il n’arrive pas à parler avec sa petite amie)
En bref, une enquête qui n’est pas menée tambour battant mais qui fait une belle place à l’analyse des sentiments et surtout à l’analyse de la culpabilité (réelle ou imaginée )

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un deuxième extrait :

Quelques instants plus tard, un autobus arriva. Thuri se leva et salua froidement Erlendur, comme si elle voulait le voir disparaître de sa vie. Le ciel était lourd. La pluie s’était remise à tomber. Il la regarda monter et s’installer près de la vitre pour continuer son errance perpétuelle a travers la ville, sans se soucier de sa destination. Sa vie était un voyage sans but et, en voyant l’autobus s’éloigner de Hlemmur, Erlendur avait presque l’impression de se voir à sa place, voyageur solitaire et sans but, condamné à une éternelle errance dans l’existence.

Mois du polar chez Sharon

Et challenge lire sous la contrainte avec Philippe avec la contrainte « scrabble » (en comptant les lettres comme au scrabble les nuits de Reykjavik « rapportent » 57 points)

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Plumes à Jokullsarlon – juillet 2015

JOKULLSARLON
Trois glaciales – mais néanmoins belles – journées de 4X4 nous ont bercés, chahutés et finalement conduits dans la baie de Joküllsarlon, littéralement « lagune des glaciers », plus prosaïquement, pays des glaçons éternels. L’eau, toujours agitée, apporte un souffle givré du glacier Vatnajökull, un air pur que nous respirons à petite gorgées, bien emmitouflés dans une chapka en peau de lapin synthétique  (7 degrés et vent du nord – on est bien peu de chose le nez rougi par le froid).
Cette baie fermée lâche, dans l’océan tout proche, de minuscules icebergs ou de gros glaçons, c’est selon.
Dans la foule de touristes, le poète peut alors s’abstraire du brouhaha. De la poudre de neige volette et fugue comme  les plumes d’un oiseau. Difficile d’imaginer un lieu si bleuté dans le vert de l’Islande…
Un manuscrit islandais du XVIIIème raconte l’envolée d’Odin sur son destrier à huit jambes, Sleipnir. Odin est un dieu polymorphe, dont le nom signifie fureur, esprit et poésie. Il n’est pas le dieu de la guerre mais celui de la victoire.
Ce livre raconte qu’un jour, Odin en voyage avec ses deux frères, trouva deux arbres couchés le long de la mer, arbres à qui ils auraient donné la vie  et qu’ils auraient changé en homme et en femme, Ask et Embla. Ces deux auraient partagé leur couche et engendré la population islandaise.
Odin monte Sleipnir – celui qui glisse rapidement – et parcourt les neufs mondes. Le cheval selon la légende serait le fils d’un Dieu et d’une jument et serait capable de traverser les enfers et de duper sa première gardienne Modgud. Dans ses nombreuses cavales, Spleinir aurait changé plus d’un destin ..
A la fin du rêve éveillé et d’une promenade le long d’une plage jonchée de glaçons qui fondent au soleil, nous regagnons notre doux nid et quittons les lieux pour Vik. Rencontrons nous un viking ou Sleipnir ?
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Les mots collectés par Asphodèle
belle, gardien, lapin, destin, envolée, fermer, souffle, partage, quitter, s’abstraire, voyage, cavale, réchapper, chose, respirer, poète, nid, rêve, vie, doux, fugue, oiseau, imaginer, balles, poudre,  bercé.
Et pour lire le texte initial de Hervé Le Tellier c’est ici

Jon Kalman Stefansson – Trilogie

ISALANDE

Entre ciel et terre

Islande – début du XXème siècle.

Le personnage principal n’a pas de prénom et est juste surnommé le gamin. Il a une vingtaine d’année et travaille avec Petrur et 4 autres pêcheurs. Il faut de lever très tôt dans la nuit, ramer dans une chaloupe secouée par la mer hostile, attendre des heures que les poissons veuillent bien mordre aux lignes. Il est en permanence entouré d’hommes rudes, ils vivent les uns sur les autres dans une cabane sommaire. Le gamin  part dans la nuit la peur au ventre en souvenir de son père noyé, le sort de nombreux pêcheurs.

Le gamin a cependant un ami dans cette équipage, Barour, un ami qui perd la vie pour une négligence. (La poésie peut tuer dans le Grand Nord).

Commence alors pour le gamin un voyage dans la neige pour ramener un des livres de Barour à son propriétaire.

J’ai trouvé cette histoire terriblement touchante et aussi si triste … Un pays rude où les enfants sont propulsés, un beau jour dans un monde cruel (comment peut on laisser mourir un homme pour quelques poissons ?)

Il est des poèmes qui changent votre journée, votre nuit, votre vie. Il en est qui vous mènent à l’oubli, vous oubliez votre tristesse, votre désespoir, votre vareuse, le froid s’approche de vous : touché ! Dit-il et vous voilà mort.

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La tristesse des anges (2ème tome de la trilogie)

Rien que le titre prévient : ce livre est triste. La tristesse des anges représente en fait la neige :  « Voilà les larmes des anges, disent les Indiens au nord du Canada quand la neige tombe. » car la neige est le personnage principal.

Le deuxième personnage est le Gamin qui poursuit son aventure suite à la mort de son ami Barour. Recueilli par Helga, il bénéficie de quelques jours de calme avant de se voir confier une mission : accompagner Jens le facteur pour porter une lettre – soi disant importante. Le lecteur sait (mais pas le gamin) que cette lettre est en fait un piège pour éliminer le facteur.
Ce monde est encore plus âpre et plus froid que dans le premier tome. Les scènes dans les tempêtes de neige sont impressionnantes. La folie du facteur ne l’est pas moins (folie suicidaire ou inconsciente?)
Le gamin croisera des familles repliées sur elles-mêmes et sur l’hiver qui n’en finit pas, familles qui le renverront à ses souvenirs d’enfance du temps où il avait une mère, un père,  une sœur et un frère (seul encore vivant mais dont il a perdu la trace à la mort des parents).

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Le coeur de l’homme (3ème tome)

De cette trilogie c’est  le tome que j’ai préféré : certainement un peu parce qu’il se déroule en été et que le froid et la neige des deux premiers tomes m’ont un peu oppressée.
Le gamin observe ses contemporains, tombe ou croit tomber amoureux.
J’ai beaucoup aimé les portraits des  femmes dans ce tome là. Que ce soit Andréa, la femme de Petrur qui quitte son mari suite au choc de la mort de Barour ou que ce soit la belle Geirbruour  qui résiste à une société très machiste en trouvant une « astuce » pour vivre en femme libre, ou encore la belle rousse (désolée je n’ai pas noté son prénom) qui fait la couverture.

Elle a des cheveux si roux qu’on les voit distinctement même à travers les montagnes. Et pourtant ces montagnes n’ont rien d’une plaisanterie, elles sont épaisses et impitoyables, mais la couleur de ses cheveux les traverse sans peine pour lui parvenir et elle change tout. Elle transforme le ciel et la terre, tout se teinte de roux.

Un très bon roman qui clôt une saga parfois oppressante et où les hommes sont bien peu de choses face à une nature hostile.

La fin – ouverte –  me fait dire que le gamin s’en sortira mais on peut aussi le voir différemment.

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Chez Edualc :

Entre ciel et terre 

La tristesse des anges

Le coeur de l’homme

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Challenge « trilogie de l’été » organisé par Philippe  et tour du monde pour l’Islande

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