Les lance-flammes – Rachel Kushner

Hasard de lecture, je lis ce roman juste derrière « John l’enfer » qui se déroulait en 1977 à New-york. Pour celui ci,  c’est la même date et New-York est un lieu important dans ce roman (ainsi que le Nevada et l’Italie).

Au départ on suit deux histoires en parallèle : D’un côté, un italien nommé Valera en 1912, de l’autre USA – Nevada 1977- avec un début sur les chapeaux de roues : Une jeune femme artiste (photographie et cinéma) participe à une course de vitesse dans le désert du Nevada : 238 km/heure, la moto part dans le décor ….suspense… on repart en Italie dans les années 30…

On se doute rapidement que les histoires vont se rejoindre : L’italien de 1917 a pour nom de famille Valera et est passionné de moto (il est dans l’armée dans une section de motocyclistes) et la jeune femme a une moto Valera et un ami qui s’appelle Valera également.

Finalement, l’histoire qui a lieu en 1977 prend assez vite le pas sur l’autre histoire «italienne » qui se déroule par  » bond  » entre les années :  1912,1917,1939, 1950…

On finit par « suivre » seulement Reno (surnom de la jeune femme qui est originaire du Nevada),  elle vient de finir ses études et se rend à New-York dans le but de devenir une artiste reconnue : elle a 21 ans, plein d’illusions et devient rapidement amoureuse de Sandro (Valera), un artiste célèbre d’une quarantaine d’années.

Le milieu de l’art à New-York dans les années 70 m’a à la fois plu et semblé bien vain : être original à tout prix, s’étourdir dans des fêtes,….
Les personnages secondaires m’ont également intéressée (surtout Ronnie Fontaine, l’ami de Sandro : sympathique, ambigu, jeune homme issu d’un milieu pauvre qui se retrouve célèbre du jour au lendemain grâce à son art)

Sandro et Reno partent quelques jours en Italie dans la famille de celui ci : une révélation pour Reno …la confrontation avec la violence dans l’Italie des années 1970 et la prise de conscience de la différence entre les classes sociales.

En conclusion : le portrait passionnant de l’évolution d’une jeune femme (durant deux ans, de 21 à 23 ans) même j’ai trouvé quelques longueurs cependant sur la vie « artistique et nocturne dans le New York de la fin des années 70. »

 

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Un extrait :

On lançait la grenade, elle explosait là où elle avait atterri alors que l’on était déjà loin. On ne la lançait pas en courant désespérément pour se mettre à l’abri, mais en roulant virement, droit devant, main sur l’accélérateur de sa moto Pope dorée – vroum et boum. Boum.
De tout le bataillon d’assaut, les opérateurs de lance-flammes avec leur double réservoir et leur masque à gaz étaient les figurines préférées de Sandro. Les pulls en amiante, les pantalons bouffants et les gants à manchette dont on pouvait les revêtir pour qu’ils ne soient pas carbonisés en mettant le feu à une forêt. Une forêt, un bunker ou un nid de mitrailleuses ennemies, cela dépendait. Les camions d’une voie de ravitaillement ou un tas de corps empilés, cela dépendait.
Les lance-flammes donnaient l’impression d’être d’un autre siècle, à la fois brutaux, antiques et horriblement modernes. L’huile inflammable contenue dans les réservoirs que transportaient les opérateurs était composée de cinq mesures d’huile légère de houille et d’une mesure de pétrole, et les opérateurs disposaient d’un petit bidon de dioxyde de carbone, d’un allumeur automatique et d’allumeurs de rechange dans une giberne accrochée à la ceinture. Le lance-flammes ne servait absolument jamais d’arme défensive. C’était une arme offensive pure, pour se rendre maître des lignes ennemies. L’opérateur s’engouffrait, créature imposante avec ses gros réservoirs sur le dos et à la main, un tuyau géant relié aux réservoirs. C’était un messager de mort. Il ressemblait à la Faucheuse, avec sa capuche en amiante au large col, et pulvérisait du feu liquide à une distance incroyable – cinquante mètres – dans les casemates et les tranchées de l’ennemi qui n’avait aucune chance de s’en sortir.
A en croire son père pourtant, les opérateurs de lance-flammes était une bande de nuls. Leurs lourds et encombrants réservoirs faisaient d’eux des cibles faciles et lentes, et on ne faisait pas de quartier s’ils étaient capturés. On n’aspire pas à ce genre de choses, disait son père, ce qui n’avait pas empêché Sandro de continuer à préférer les opérateurs de lance-flammes, à leur réserver une fascination particulière, avec leurs sinistres costumes d’amiante à capuche et leur long tuyau malfaisant qu’ils pointaient sur les ennemis qui leur faisaient obstacle. Mais Sandro ignorait si son intérêt était une forme de déférence ou de pitié.
Roberto qui criait: « Kaiserschlacht ! » en versant de l’essence sur ses figurines en papier.
Sandro, huit ans, le visage humide de larmes qui répondait : « pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi Kaiserschlacht ?»
Parce que, avait dit Roberto, la moitié d’entre sont morts dans l’offensive et les autres ont dû être exécutés pour pillage. Tu ne sais donc pas ce qui s’est passé ? C’est la retraite de l’Isonzo au Piave, après une attaque aux gaz toxiques par les sections d’assaut allemandes. Si tu veux jouer aux Arditi, il faut le faire correctement, en respectant le déroulement réel des batailles.

 

Le mois américain est Chez Titine. (Le thème du jour est « un roman féministe ou écrit par une femme »)

Mon désir le plus ardent – Pete Fromm

« Mon désir le plus ardent » commence comme une romance un peu caustique : Maddy est étudiante et l’été elle travaille comme guide touristique sur les canyons, en canoë dans les rapides du Wyoming …Elle a 22 ans, est  plus ou moins en couple avec Troy, la quarantaine.., jusqu’au jour où elle rencontre Dalt, 22 ans, « passeur » en canoë également : coup de foudre …

Ils se marient sur l’eau, d’où cette très belle couverture, ils montent leur entreprise de canoë dans l’Oregon.

Leur bonheur est sans tache durant 5 ans : Enceinte de son premier enfant, Maddy apprend qu’elle est atteinte d’une sclérose en plaque. Commence alors une lente dégradation de sa santé : on progresse dans la lecture par saut dans le temps : Maddy à 22 ans, 27, 30, 33 , 40…

J’ai aimé ce couple hors du commun qui ne baisse pas les bras …
Petit avertissement  : A lire quand on a le moral tout de même : Je partage l’avis de Dalt, le mari de Maddy, a un moment (je cite de mémoire) : « Je t’admire Maddy, pour ma part je serais allé me mettre à la rivière »

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Un extrait :

…Comment en est-on arrivés là ?
Je ne parle pas de la maison, je parle de nous. On ne se dit plus rien on évite le vrai sujet, comme s’il allait finir par se lasser de nous et partir.
– Quoi ?
– On n’a pas de secrets l’un pour l’autre, Dalt. Mais tu as trouvé un emploi sans me le dire. Et une maison. Une maison qui pourra s’adapter au pire.
– C’est juste que…
– C’est juste qu’on a peur. (..)
– Ne nous laissons pas envahir par la peur au point de ne plus se parler. D’accord, Dalt ? Ce serait vraiment dommage. De laisser une maladie à la con nous faire ça.

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Le mois américain est Chez Titine.

Le logo a été réalisé par Belette . Il y en a plein d’autres 🙂

 

Que lire un 28 ou 29 septembre ?

Quand c’est arrivé, j’allais sur mes 24 ans. C’était en août et je suis née en septembre, le 28 ou le 29, on l’a jamais su. On m’a trouvé bébé près de ma mère morte, dans une de ses cabanes de plage où l’on range les transats et les matelas Elle m’avait mise au monde toute seule. Je braillais miam-miam depuis si longtemps que j’en pouvais plus. Bref, ils ont marqué sur la déclaration 28 ou 29, ils se sont pas encombrés des détails. N’empêche que j’ai eu deux fois dans ma vie mon nom dans le journal, et c’était la première.
Pendant vingt-quatre ans, j’ai plus fait parler de moi. Un ange. Quand la célébrité m’a touchée de nouveau, j’étais pute dans une maison, mais très chic, très bien fréquentée. Fleurs dans les vases par bouquet d’un louis. Salle de bain personnelle en céramique turquoise et tous les robinets en argent. Chambre avec baldaquin entouré de voiles, pour la poésie et contre les moustiques. Et mon balcon sur l’océan. C’était « la Reine de cœur ». Si vous n’avez pas connu, vous n’avez rien connu.

Belinda
La passion des femmes – Sébastien Japrisot

John L’Enfer – Didier Decoin

Pour ce livre n’oubliez pas de vous munir de votre baudrier, casque, et cordes de rappel : Didier Decoin nous entraîne à la suite de John L’Enfer. Celui ci est Cheyenne et travaille comme laveur de building à New-York (comme de nombreux indiens qui, parait-il, n’ont pas le vertige). En tout cas même sans vertige, c’est un métier très dangereux : un ami de John l’Enfer vient de tomber du du 35eme étage. (Douzième accident mortel en six mois).

D’abord ce roman est fortement ancré dans le réel – puis – tourne peu à peu au fantastique : John l’Enfer fait au 40eme étage d’un immeuble une rencontre improbable. …
Autre élément fantastique : Les chiens quittent en masse la ville de New York pour se réfugier dans les collines proches de New-York.
D’ailleurs John l’Enfer fait de même : il « s’évade » régulièrement de New-York pour rejoindre une maison dont il est propriétaire : 3h 00 de route de New-York pour se retrouver avec une vue sur la baie, en face de New-York .
Enfin, New-York est un colosse mais très fragile : des immeubles entiers sont insalubres, des maisons s’effondrent atteintes de la « lèpre ».

Ce roman bien que centré sur le Cheyenne raconte aussi la rencontre entre John L’enfer, Ashton Misha et Dorothy : John rencontre les deux autres dans un hôpital (où il vient laver les vitres). Misha vient de se faire opérer de l’appendicite , il est second sur un cargo et son navire est donc reparti sans lui. Il est très isolé (dépressif ?) , la cinquantaine. D’origine polonaise, il est arrivé d’Europe à la fin de la deuxième guerre mondiale et depuis il navigue sans rester longtemps sur la terre ferme. Dorothy, elle, a eu un accident de surf et est aveugle (« de façon provisoire » lui disent les médecins) : elle porte un bandeau en permanence sur les yeux en attendant sa guérison.
Dorothée est professeur en sociologie urbaine à l’université, très choquée par son nouvel handicap elle se repose entière sur Ashton et Misha et m’a parue un petit peu passive.

Au delà de l’histoire très intéressante – que vont devenir John, Misha et Dorothy ? – ce qui m’a le plus impressionné, c’est la vision qu’a John de la ville de New-York : on a l’impression que la ville vit, respire, convulse en essayant de se débarrasser des hommes…

En conclusion : un livre que j’ai lu d’une traite comme hypnotisée, et que j’aurais du mal à classer tellement les facettes sont nombreuses : chemin initiatique pour Dorothy, roman militant pour les minorités, roman écologique avant l’heure, conte et légende indienne, dénonciation de la politique et de ces élus corrompus, fantastique….
Bref je recommande…

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Extraits :

Le secret, c’est peut-être d’accepter les aiguillages comme ils viennent ; de ne pas regarder derrière soi pour tenter de retrouver la route perdue.

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« Logiquement, dit-elle, je devrais en référer à notre président. Il ne vous aime pas beaucoup : tout Cheyenne que vous êtes, il estime que vous avez un caractère d’Apache. Eh bien, tant pis, je décide toute seule. Alors, c’est entendu : les Filles des combats de l’avenir vous encadreront, demain. Admettons qu’elles représentent le service d’ordre. Vos pancartes dans la voiture ? Nathan va descendre les chercher, nous allons étudier vos slogans. Politiquement parlant, nous devons respecter une certaine orthodoxie. »

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Anderson se lève, s’approche d’une carte murale :
« Ces drapeaux rouges balisent les zones urbaines où l’hygiène tombe en dessous du quota généralement admis. Les secteurs pince-à-linge, si vous me comprenez. Aux limites de Brooklyn, deux parcs ont été déclassés – ils font désormais partie des décharges publiques. Aimeriez-vous savoir pourquoi Isaac Baumstein ne sera pas réélu ? Parce qu’on a trouvé des bébés morts parmi les boites de conserve et les vieux journaux, là-bas. Le sénateur Cadett dit qu’il est possible que ces bébés ne soient pas américains. Ils peuvent être la progéniture indésirable d’immigrés clandestins. Qu’est-ce que ça change ? Ces bébés ne sont pas venus mourir tout seuls sur des décharges – des décharges qui sont bien américaines, elles. Aidez-moi à nettoyer tout ça. Vous aurez des crédits. Je ne sais pas où je prendrai le fric, mais vous l’aurez.
John L’enfer dévisage Anderson, incrédule : il se demande pourquoi, brusquement, des politiciens tiennent tant à l’avoir dans leur manche. Ne comprennent-t-il pas, Anderson et les autres, que le problème de New York a cessé d’être politique ? Parce que toute politique suppose qu’on puisse encore faire marche arrière.
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Le mois américain est Chez Titine.

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Les cent puis de Salaga – Ayesha Harruna Attah

Afrique – XIXème siècle.

Premier chapitre : Aminah, adolescente, prépare et vend de la nourriture aux personnes de passage dans son village, tout en s’occupant de ses petites sœurs, des jumelles.
Dans son village de Botu, circulent des rumeurs : des cavaliers enlèveraient des personnes pour les « vendre » en tant qu’esclaves.

Deuxième chapitre: à Salaga, Wurche est la fille du roi : elle assiste à des courses de chevaux et à des négociations entre son père et des tribus voisines. Elle a, comme Aminah, une quinzaine d’année…

Chaque chapitre commence par le prénom d’une des deux adolescentes, l’auteure va nous raconter le passage  à la vie adulte de ces jeunes filles, qui n’ont en commun que leur âge et leur lieu de naissance : un village pas très éloigné de l’océan en d’Afrique de l’ouest (une contrée qui ne s’appelle pas encore le Ghana).
Qu’elle soit fille de roi ou de cordonnier, leur destin est tracé: épouser l’homme désigné par leur famille ou les alliances futures… jusqu’au jour où, pour Aminah, le monde s’effondre : elle est emmenée par les marchands d’esclaves …avec ses sœurs, sa maison est brûlée ainsi que tout son village…

J’ai aimé l’aspect historique de ce livre : il y a beaucoup de livres qui ont pour toile de fonds la traite des esclaves en Amérique mais finalement peu en Afrique : l’histoire se passe à la fin du XIX Elle siècle, on apprend au fur et à mesure que l’esclavage a été aboli en Europe et aux États Unis mais perdure en Afrique. De plus, les européens essaient de s’attirer les bonnes grâces des africains : anglais, allemands, français c’est à qui l’emportera pour s’allier les peuples africains : guerre fratricides et divisions au rendez vous …

Côté personnages il sont également convaincants , j’aurai aimé en savoir plus sur Moro, fils d’esclaves devenu chasseur d’esclaves à son tour. Il est conscient du «mal » que représente l’esclavage sans savoir comment faire la transition… quant aux deux personnages principaux, Wurche m’a séduite par sa volonté et sa fierté et Aminah par sa douceur et son opiniâtreté…

En conclusion : un moment de lecture dépaysant et instructif.

Livre lu dans le cadre du Challenge chez Madame lit, le thème de septembre  est : un roman de la rentrée littéraire

Mohawk – Richard Russo

Mohawk – une petite ville aux USA – 1965 -1950 -1971 – Son dinner, son collège et son hôpital

Première partie : Les personnages sont nombreux et on apprend doucement à les connaître : Il y a Anne, divorcée et mère de Randall (un petit génie de 13 ans), il y a Dallas le père de RandalL qui m’a bien fait rire. Le père d’Anne, Mather, est gravement malade, la mère est obsessionnelle…

Par ailleurs il y a Lorraine, la veuve du frère de Dallas, Diana, la cousine d’Anne et Dan son mari en fauteuil roulant suite à un accident de la route.
Il y a aussi Rory Gaffney (le méchant ) son frère le flic,son neveu Wild Bill, un peu demeuré (mais il n’a pas toujours été comme cela…il y a 15 ans il était « normal ») : il défend Randall qui est racketté.

J’ai beaucoup aimé comment l’auteur « balade son lecteur » d’abord dans les années 65 puis dans les années 50…
Des aller-retours qui font entrevoir ce qui s’est passé quinze ans avant : les personnages sont complexes, attachants.

Deuxième partie : Nous retrouvons tous les personnages 6 ans plus tard.
Randall vient d’arrêter l’université au milieu de sa deuxième année : il rentre à Mohawk en stop. Au début des années 70, l’arrêt de l’université est synonyme de « départ au Vietnam », il réfléchit à s’enfuir au Canada. Il rencontre la sœur de Wild Bill.
Au même moment celui revient également à Mohawk …la tension monte, les secrets se dévoilent…(pas tous), le situation devient explosive…

Un livre presque aussi enthousiasmant que « Le déclin de l’empire Whiting » dans sa chronique de personnages et de secrets…

Un extrait

Au Mohawk Grill, il existe de nombreuses méthodes pour trouver les chevaux gagnants, et chaque habitué qui se faufile à l’intérieur du diner quand Harry ouvre à six heures tapantes possède la sienne, mais ils admettent volontiers qu’aucun système n’est infaillible sans quoi tous les parieurs vivraient en Floride. Alors, ils établissent des formules mathématiques complexes, non pas pour déterminer quel cheval va gagner, mais quel cheval l’emporterait si les courses n’étaient pas truquées. Cette conviction cynique que la science du handicap est gravement compromise par la malhonnêteté et la cupidité ne les contrarie pas. Éplucher les statistiques d’entraînement, les résultats en fonction de l’état de la piste, le niveau de compétition… C’est une occupation agréable en soi, surtout dans la lumière grise du petit jour, qui entre par les vitres du diner et se répand sur leurs journaux hippiques. Plus cyniques encore sont ceux qui pensent que les chevaux ne comptent pas, ou peu, et qu’il vaut mieux miser sur l’entraîneur qui se fournit chez le meilleur pharmacien. Un point de vue guère répandu car il est impossible de savoir, au jour le jour, qui s’est allié le meilleur fournisseur ; cette théorie n’incite donc pas à parier.
Harry joue lui-même rarement, mais il a quand même une théorie. Il n’a jamais éprouvé le besoin de la faire partager aux vieux de la vieille chevronnés qui boivent son café, tous des minables, aux compétences et aux références impeccables, qui se moqueraient de la simplicité naïve de sa méthode. N’empêche, elle a plutôt bien marché jusqu’à présent et les aficionados étaient les premiers à admettre qu’on ne pouvait pas gagner contre les chevaux de toute façon. Ou les chiens. Ou les dés. Ou les cartes. Vous pouviez juste essayer.
Quand Harry parie, il parie sur les jockeys, et même s’il est plus difficile de les handicaper que les chevaux qu’ils montent, ils ne sont pas totalement immunisés contre l’observation scientifique. Harry suit une règle primordiale : ne jamais miser sur un jockey non expérimenté. Il leur arrive de gagner, mais la plupart du temps, ils réussissent à perdre même quand on leur donne une bonne monture. Certains semblent nés pour perdre. Les meilleurs jockeys possèdent plus ou moins le même talent, mais ce qui fait la différence pour Harry, c’est l’esprit humain : la fierté la concentration. Le désir. Des qualités qui ne sont pas constantes, Harry le sait bien, c’est pourquoi il observe leurs fluctuations jusqu’à ce que son diapason interne et subtil se mette à vibrer à l’unisson et lui suggère par exemple que Shoemaker va faire gagner cinq chevaux d’affilée. Par conséquent, Harry misera sur lui chaque fois qu’il sera au départ, quelque soit le canasson, il continuera jusqu’à ce qu’il sente la fierté, le désir et la nécessité l’abandonner pour rejoindre un autre jockey. C’est une théorie idiote, il le sait, mais ça lui apporte du plaisir, et parfois même ça marche.

Le mois américain est Chez Titine.

Le thème du jour est « premier roman  » …

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Que lire un 23 septembre ?

L’ambulance emporta Pablo Neruda vers Santiago. Sur la route il fallut éviter les barrages de la police et les contrôles militaires.
Il mourut le 23 septembre 1973 à la clinique Santa Maria.
Tandis qu’ il agonisait, sa maison de la capitale, sur une pente de la colline San Cristobal, fut mise à sac, les vitres furent brisées et l’eau des robinets ouverts provoqua une inondation.
On le veilla au milieu des décombres.
La nuit de printemps était froide et ceux qui entouraient le cercueil burent des tasses de thé jusqu’au lever du jour. Vers les trois heures du matin, une jeune fille en noir, qui avait déjoué le couvre- feu en passant par la colline, vint se joindre à la veillée.
Le jour suivant, il fit un soleil discret.
De San Cristobal au cimetière, le cortège grossit. En passant à la hauteur des fleuristes de Mapocho, on cria, avec le nom du poète mort, celui d’Allende. L’armée, baïonnettes pointées, entoura le cortège.
Aux abords de la tombe, les assistants chantèrent l’Internationale.

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Une ardente patiente – Antonio Skarmeta

Americanah – Chimamanda Ngozi Adichie

Nigeria – USA – Angleterre (2000-2010)

L’histoire démarre avec Ifemelu. Dans la première partie, nous apprenons qu’elle est Nigériane et vit aux USA depuis treize ans. Elle est sur le départ pour retourner au Nigeria où elle a encore sa famille et son amour de jeunesse, Obinze (avec qui elle a coupé toute communication depuis une douzaine d’années)
Elle n’est pas retournée au Nigeria une seule fois en 13 ans. Pourquoi rentrer maintenant (définitivement ?) alors qu’elle a un bon poste à Princeton, la citoyenneté américaine et un blog qui fonctionne bien et la rend indépendante financièrement ?
Certainement parce qu’elle a 33 ans et est à un tournant de sa vie : elle vient de rompre avec Blaine, un afro américain, professeur d’université.

Avant d’entamer ce retour, elle décide d’aller chez le coiffeur (compter six heures de boulot pour refaire tresses et extensions !! : l’occasion de revivre tout ce qui s’est passé de son enfance à aujourd’hui. Notamment elle se souvient de sa rencontre au Nigeria avec Obinze : en toile de fond de cette partie la richesse et la pauvreté du Nigeria , des coups d’état qui se succèdent, des grèves et une corruption endémique qui laissent peu d’espoir :  Les jeunes veulent partir.  Obinze vient d’une famille plutôt aisée et n’a pas connu de guerre ou peur pour sa vie mais il tente quand même l’aventure (clandestine) vers l’Europe (l’Angleterre) à défaut de l’Amérique
Ifemelu, elle, est d’origine plus modeste mais aura la « chance » que son dossier pour une université américaine soit accepté : le sort d’Ifemelu comme d’Obinzé a dépendu uniquement la volonté d’un fonctionnaire nigérian de valider un dossier administratif….

J’ai passé une excellente semaine avec ce roman, captivant au niveau de l’histoire, entrecoupé des articles du blog d’Ifemelu avec l’analyse de cette femme africaine sur ses contemporains américains et  africains : sommes nous tous racistes ? Comment s’intègrer dans une société qui se dit une démocratie mais tellement inégalitaire dans les faits (pour les Usa) ? comment est régie la société nigériane entre tradition et désir de liberté ?

J’ai en particulier beaucoup aimé la partie où Ifemelu raconte l’espoir soulevé par la campagne et l’élection de Barack Obama à la présidence..

 

Mois américain chez Titine (le thème du jour est minorités) et pavé de l’été chez Brize (704 pages en poche)

Destination PAL 2019 – le bilan

Cette année pour le challenge Destination PAL  Chez Liligalipette 🙂 voici ce que j’ai lu sur ma liste de 10 titres 🙂

Quinzinzinzili de Régis Messac

Le peigne de Cléopâtre de Maria Ernestam

John l’enfer de  Didier Decoin (parution billet bientôt le 27/09)

Swamplandia de Karen Russel

L’art de la joie – Gollarda Sapienza (celui que je n’ai pas lu lors du Destination PAL 2018)

22/11/63 de Stephen King

Une trilogie 1Q84 1 ; 1Q84 2 ; 1Q84 3

 

Trois livres n’ont pas été lus et retournent au fin fonds de ma PAL (jusqu’à l’an prochain ? )

6 – L’enfant perdue d’Elena Ferrante

8 – Gagner la guerre de Jean-Philippe Jaworski

9 – Le tambour de Gunter Grass

 

Que lire un 21 septembre ?

Je crois que le dictionnaire me fait du bien, je crois que je vais surmonter des difficultés qui me semblaient auparavant insurmontables et je ne parle pas de ce que j’ai en tête : si je surmonte vraiment mon handicap, j’irai vivre seule parce que tous ces gens sont fatigants je vois en profondeur tout autant que je parle en surface ce que je vois en profondeur ne me plaît pas et de loin ça me fera moins mal ou ça ne me dérangera pas parce que je m’éloigne chaque minute davantage de ce qu’on appelle famille et je m’occupe de plus en plus de moi.

J’achetai une grande toile pour peindre mon monde.
Le jaune me porte malheur et je suis superstitieuse mais ici il va m’être indispensable (dictionnaire) comme à certains peintres qui ont ensuite souffert de crises de folie et de suicide mais dans mon cas le premier point serait inévitable parce que ma famille laisse beaucoup à désirer et le deuxième dépend de moi il ne m’attire pas.
Pour inaugurer le gril, don José choisit le jour de l’anniversaire de Betina qui est le 20 septembre le dernier jour de l’hiver car le 21 c’est le début du printemps. Betina commença être quelqu’un à partir de ce choix.

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Les cousines – Aurora Venturini