Cantal 1914 – Les hommes s’apprêtent à partir au front, emportant leur chevaux et laissant femmes et enfants fort démunis pour la fin des récoltes.
Joseph, 15 ans, reste avec sa mère et sa grand mère, et travaille aux champs avec l’aide d’un voisin bienveillant Leonard.
L’autre voisin Valette, lui, est cupide, mauvais et souhaite récupérer les terres de la famille de Joseph. Il accueille (de mauvaise grâce) la femme de son frère et sa fille de 15 ans.
On se doute rapidement qu’une idylle va naître entre les deux adolescents (qui vont devenir rapidement adultes dans cette période tourmentée)
Étrangement les trois premiers quarts m’ont semblé convaincants et passionnants avec cette plongée dans la campagne de 1914 mais j’ai trouvé la fin bâclée et « laissant en plan » certains personnages que j’ai appréciés.
Légère déception donc pour ce livre que l’on m’a tant vanté (ceci expliquant peut être cela).
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Un extrait
Avec la lame de son couteau, Joseph gratta la surface d’un large rondin pour retirer les croûtes d’argile collées, puis versa de l’eau par-dessus à l’aide d’une écuelle flottant dans un seau. Il prit ensuite la motte de terre récoltée le matin au bord de la rivière et la déposa sur le billot humidifié. Il l’observa longuement, inventoriant dans le détail la série de gestes nécessaires à l’accomplissement de son projet, et ses lèvres bougeaient en même temps qu’il baladait ses mains dans le vide, comme un qui est inventerait son propre langage.
Lorsqu’il en eu terminé avec ses gammes, Joseph construisit une structure sommaire en fils de fer, ressemblant à une lettre dégotée dans l’alphabet grec. Puis il trempa ses mains dans le seau et se mit à attendrir la terre, à la pétrir longuement pour en faire une forme malléable, qu’il partagea ensuite en deux boules d’égales proportions. Il commença par malaxer un morceau, l’humidifiant fréquemment. Sa langue voyageait sur ses lèvres. Une croûte trapue munie d’un large cou se matérialisa et il renversa la forme sur le rondin. Préleva ensuite un peu de glaise sur l’autre boule, et façonna une jambe puissante qu’il incrusta dans la masse. Il procéda à l’identique pour les trois autres membres, jusqu’à faire disparaître les jointures et apparaître les galbes. Puis il conçut une tête chevaline et la souda aussitôt au cou de l’animal. Avant que la terre ne se solidifie, il matérialisa une fine crinière de la pointe de son couteau. Durant tout le temps des opérations, Joseph reculait souvent et revenait parfaire un détail, afin que la copie fut aussi proche que possible de ce qu’il avait en mémoire : un percheron massif nommé César, ce compagnon qu’il avait toujours connu.