La source cachée de Hella S. Haase

 Lecture commune avec Eeguab.

LASOURCECACHEEL’histoire en quelques mots : Jürgen a été malade et est actuellement convalescent. Pendant sa convalescence, il s’est fixé le but de vider la maison des grands-parents maternels de sa femme, Rina, afin que la maison soit mise en vente. Tout le roman se déroule vu par Jürgen : il écrit des lettres à sa femme, qu’il ne lui envoie pas finalement, il écrit dans son journal en nous rapportant ses ressentis, ce que lui dit un des médecins du village…. Le docteur Meinderts semble rongé par le souvenir d’ Eline, mère de Rina. Cette Eline qui disparaît un jour sur une plage….
On ne connaîtra pas l’avis de Rina.
Rina n’a jamais habité cette maison, elle a été élevée par ses grands-parents paternels après la mort de sa mère, peu après sa naissance, et celle de son père lorsqu’elle avait une dizaine d’années. Jürgen est à un des tournants de sa vie : son mariage avec Rina semble plus que vacillant et en partant à la découverte de la mère de Rina, il se rencontre lui-même. Il fait le point sur ce qu’il est (un scientifique travaillant dans un laboratoire) et ce qu’il aspire à être (un écrivain).
Il s’agit presque d’une enquête sur la raison de la disparition d’Eline : accident ? Suicide ? Fuite ?Les descriptions de la nature environnante et de la maison sont très prenantes et on croirait la maison encore habitée de l’âme d’Eline et de sa difficulté à trouver sa place dans le monde (comme Jürgen).

En conclusion : j’ai énormément apprécié de suivre les pensées de Jürgen, que l’on sent désemparé au début, un peu rassuré ensuite. Il est très ambivalent, son regard sur sa femme est assez froid, son regard sur Eline très indulgent : est il juste ?  J’aurais aimé avoir la vision de sa femme sur leur relation.

Un petit extrait

Infinie est la diversité des images d’un solstice à l’autre ; celui qui observe d’un regard aiguisé par un si grand désir voit comment, à chaque seconde, naît une nouvelle situation sans rapport avec tout ce qui précédait et différente de tout ce qui suivra. Jamais une tache d’ombre n’est deux fois la même sur une feuille ou sur le sol; comment puis-je conserver l’image de la courbe décrite par une volée d’oiseaux fendant le ciel comme une flèche? De telles questions ne cessent de me tourmenter pendant mes vagabondages dans le bois de Breskel. Mes sens réagissent avec une intensité prodigieuse à chaque impression ; le règne des formes, des sons des couleurs est ici tout puissant. Moi, l’homme, je ne suis plus le centre mais seulement une partie de la création. La libellule, cet éclat vert qui danse dans un faisceau de lumière, connaît un plaisir qui ne me sera jamais accordé; j’envie l’industrieuse fourmi, sans cesse en route vers un but déterminé – j’envie aussi les araignées qui tissent des toiles dans une sereine cruauté, et les oiseaux insouciants. La conscience que j’ai moi , l’homme, grâce à mon système nerveux plus compliqué, d’être la créature la plus fébrile et la moins harmonieuse sous les étoiles, ne fait qu’accroitre mon désir de m’abîmer à jamais dans la perfection de la nature alentour. A Breskel, le danger se cache dans le suave poison que l’on respire entre les roses et l’herbe ; un désir de disparaître en tant qu’individu, de devenir un élément de la beauté immortelle, d’entrer dans l’éternité comme les nuages et la lumière solaire, de vivre, aussi calmement que les plantes, l’alternance et le retour de la matière (p 37- 38)

Challenge : Mon tour du monde chez Helran pour les Pays-Bas (Hella S. Haase est une auteure néerlandaise)
challenge tour-monde-8-ANS

Pas facile de voler des chevaux – Per Petterson

PASFACILEDEVOLDERDESCHEVAUXTrond Sander, 70 ans, vit isolé dans un village de Norvège. Il raconte…. par bribes..pêle-mêle : Ce qu’il a vécu quand il avait 15 ans en 1948… ses relations avec son père… sa découverte de la réalité de la vie des adultes…. les drames de l’existence…l’immédiate après guerre en Norvège, sa vie de vieil homme dans un bourg isolé.
Avec son ami Jon, lui aussi 15 ans, leur jeu est de « voler des chevaux » à leur voisin. Voler des chevaux est un bien grand mot, il s’agit « juste » de les monter à cru dans le pré …et de se prendre pour des cow-boys…
Avec une écriture très fluide, très proche de la nature, Per Petterson nous emmène entre adolescence, âge adulte et réflexions sur la vie (et la fin de vie).
Trond Sander, est veuf, il a une fille à qui il parle peu… on sent tout la difficulté à communiquer. Ce livre est l’histoire de l’été de ses quinze ans où il est passé de l’enfance à l’âge adulte….A 70 ans, on le sent serein, il savoure ses dernières années et en profite pour se remémorer les instants heureux et malheureux de sa vie, de celle de son père, de Jon et de sa famille.
J’ai trouvé la description de ses relations avec son père très juste et très intéressante. Grâce à un voisin, Trond apprend que son père s’est engagé dans la résistance pendant la guerre et que « voler des chevaux » avait un autre sens pour lui. Son regard d’adolescent observe et ne comprend pas la vie des adultes. Il est tour à tour vif, révolté, effondré, amoureux….
La nature sauvage a une très belle part dans ce livre.
En conclusion  : un livre que je recommande fortement.

Deux extraits : 

Début novembre. Il est neuf heures. Les mésanges viennent se cogner à la fenêtre. Un peu assommées, il leur arrive de reprendre leur vol, mais parfois elles tombent et se débattent un moment dans la neige fraîche avant de retrouver l’usage de leurs ailes.(Incipit)

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Jon et moi avions fini de traverser le pré.. Nous marchions sur la route, et nous avions beau connaître le chemin comme notre poche, tout nous paraissait différent. Nous allions voler des chevaux, et ça se voyait. Nous étions des criminels. ça transforme les gens, ça change quelque chose dans leur regard et dans leur façon de marcher c’est inévitable. Et voler des chevaux, c’était ce qu’il y avait de pire. Nous connaissions les lois qui régnaient à l’ouest de Pecos, nous dévorions les illustrés et leurs histoires de cow-boys. Et même si en réalité nous étions si loin à l’est de Pecos qu’on pouvait aussi bien dire le contraire ; ça dépend dans quel sens on regarde le monde. Et ces lois étaient sans pitié. Si tu étais pris, on t’attachait à une branche d’arbre, une corde autour du cou ; du chanvre grossier contre ta peau douce. Puis quelqu’un donnait une tape sur le cul du cheval et tu courais dans le vide comme s’il y allait de ta vie. (p 35)

L’avis d’Eeguab est ici.

Livre lu dans le cadre de plusieurs challenges 😉

« Jacques a dit » de Métaphore : « doubles initiales »

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Challenge Totem de Liligalipette

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Challenge lire sous la contrainte de Philippe avec la contrainte « Phrase négative »

Le titre devra donc comporter une négation c’est-à-dire, normalement le petit mot « ne » suivi de « pas, rien, jamais, plus » ou précédé de « personne, rien, nul« .

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Challenge « animaux du monde » de Sharon

CHALLENGE-animaux

Challenge « tour du monde » d’Helran pour la Norvège

challenge tour-monde-8-ANS

Et enfin challenge à tout prix de Laure
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‘Pas facile de voler des chevaux’ a obtenu le prix littéraire européen Madeleine Zepter le 7 décembre 2006.

‘Pas facile de voler des chevaux’ a reçu le prix des lecteurs de littérature européenne dans le cadre du Prix de littérature européenne de Cognac 2007.