Riquet à la Houppe – Amélie Nothomb

Audio livre (pris au hasard à la bibliothèque pour sa (courte) durée – 3h00 – et « lu »  en voiture – avant confinement)

Amelie Nothomb commence par nous raconter la naissance et la petite enfance de Déodat. D’emblée le ton est donné: il s’agit d’un conte (moderne) car l’auteur prête au nouveau-né des réflexions qu’un nouveau-né ne peut pas avoir (sur la vie, les relations humaines…)
Cette famille un peu atypique, composée de Enid, la mère, d’Honorat le père et de Déodat, m’a été d’emblée sympathique.
Déodat est né laid (le mot est faible, il est hideux). Sa maman en le voyant à sa naissance pense aussitôt au conte Riquet à la houppe. Grâce à la bonté et à l’amour de ses parents, Deodat grandit harmonieusement.
En parallèle, nous suivons l’enfance d’une petite fille Trémière (sa mère s’appelle Rose et sa grand mère Passerose)
Celle ci est d’une beauté exceptionnelle mais passe rapidement (et à tort) pour une simple d’esprit. Cette famille est moins sympathique que celle de Déodat mais les liens petite-fille/grand-mère sont très bien évoqués.

J’ai lu beaucoup de livres d’Amélie Nothomb et celui là est un cru excellent me concernant : Deux histoires en parallèle (qui finissent par se rejoindre mais très tard dans l’histoire), des personnages (de conte) très humains, beaucoup de vocabulaire que l’on trouve rarement dans les romans, de l’érudition sans trop en faire… Bref, j’ai été de plus en plus intéressée au fil de la lecture. Une très agréable surprise car je ne suis en général pas amatrice de contes revisités ….

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un extrait

Il consacra sa thèse de doctorat à la huppe fasciée. Les professeurs, intrigués par ce jeune homme d’une laideur à ce point remarquable, le surnommaient Riquet à la Huppe. Il approuva ce sobriquet dont il salua la justesse étymologique, houppe et huppe constituant les deux versions du même mot. Ce surnom lui allait d’autant mieux que, comme le personnage de Perrault, il plaisait à tous, et particulièrement aux femmes.

 

Challenge Petit bac  chez Enna – catégorie « prénom » et mois belge chez Anne et écoutons un livre chez Sylire

L’avocat, le nain et la princesse masquée – Paul Colize

Le titre de ce polar m’a fait penser au film «le bon, la brute et le truand ». On n’en est pas loin car chaque chapitre a un titre de film.
Sur le fond c’est un polar assez classique avec une erreur judiciaire au début, le héros avocat est accusé du meurtre d’un splendide mannequin. Il prend la fuite et commence un périple digne de George Kaplan : de l’action, des sueurs froides (!), des aéroports, des méchants bas du front (joueurs de foot :-)), des paris truqués, un deuxième meurtre, un chantage…

Un livre qui ne me laissera pas un souvenir impérissable mais plutôt un souvenir (plaisant) de  parodie avec une enquête menée tambour battant et du suspense : le nain arrive à la toute fin, juste avant que Fantomette soit démasquée 🙂

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Et comme j’aime bien les listes voici les films en question (titres des chapitres)

La fiancée du pirate / Parfum de femme / Nuit d’ivresse / Le facteur sonne toujours deux fois / Very bad trip / Garde à vue / L’impasse / L’ombre d’un doute
La mort aux trousses / La femme d’à côté / La clef des champs / Le procès / Le fugitif / Fenêtre sur cour / Jeux interdits / Le faussaire / L’été meurtrier / Nuit et brouillard / A bout de souffle / Le fil du rasoir / Plein sud / La fièvre du samedi soir / Casablanca / L’aveu / Protocole fantôme / L’étau /Un taxi pour Tobrouk / Un thé au sahara / Chambre avec vue / L’échange / Un moment d’égarement / Duel / Le grand alibi / L’arnaque / Sueurs froides / L’appât / Conversation secrète / La nuit du chasseur / La main au collet
Une journée en enfer / Deux hommes dans la ville

Un extrait (prologue)

Le mariage est la principale cause de divorce.
Sans le premier, le second n’aurait jamais vu le jour. L’affaire se limiterait à une séparation assortie de quelques larmes ou de vagues reproches. La vie reprendrait ensuite son cours et chacun poursuivrait son chemin la tête haute.
Un coup de gueule fielleux ou un suicide avorté viendrait de temps à autre troubler l’ordre des choses, mais ce ne seraient que des cas isolés.
Il n’y aurait pas ces discussions orageuses, ces règlements de comptes miteux, ces débats houleux, ces polémiques sordides, ces déballages impitoyables et ces vaines tentatives de réconciliation. Il n’y aurait ni palabres interminables, ni négociations nauséeuses pour la garde du chien ou la répartition de la vaisselle.

Le mois belge est chez Anne …et le challenge polar chez Sharon

Que lire un 24 décembre ?

En traversant la cour, ils entendirent une salve de déflagrations qui venait de la forêt toute proche, dans les parages du ruisseau où Mathias et Renée avaient dû laisser la jeep. Un obus passa non loin de la ferme. Jeanne sursauta et renversa une partie du lait qu’elle transportait.
Dans la cave, les civils étaient tétanisés par les tirs. Personne ne fit donc attention à la mine chamboulée de Jeanne ; on mit cela sur le compte de la peur. Jules grogna, il voulait les Américains dehors. Mais Pike n’était pas décidé à partir ; la radio restait inutilisable, et ils n’allaient pas se fourrer au cœur des combats, avec si peu de munitions, et deux blessés qui n’étaient pas encore en état de marcher.
On distribua le lait, qui apporta un peu de réconfort. En buvant sa première gorgée, Sidonie fut frappée par une image : elle se revoyait enfant, assise sur les genoux de sa grand-mère, sirotant son « lait de poule » tiède devant le sapin de Noël. Et ça lui revînt: on était le 24 décembre, le soir du réveillon. Personne n’y avait pensé ! Elle dit :
« Et si on en gardait pour ce soir ? C’est le réveillon ! »
Tous se figèrent , complètement abasourdis. Noël. C’était presque absurde en un moment pareil, avec la guerre tout autour, les gens qui meurent, qui marchent dans la neige, ou qui attendent, affamés et congelés dans les caves, avec les maisons en ruines, les bêtes éventrées dans les cours, et sur les chemins, les forêts en flammes.

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Today we live – Emmanuelle Pirotte

Today we live – Emmanuelle Pirotte

Genre : rencontre improbable sur fonds de seconde guerre mondiale

Un tout petit roman (224 pages) mais riche en événements et émotions. Dans les premières pages, on rencontre Renée chez des fermiers. Elle a 7 ans, apprend qu’elle doit à nouveau fuir mais finit quand même sa tartine …(les nazis sont à la porte du village des Ardennes belges, l’action se passe en décembre 1944. La guerre en est à ses derniers soubresauts mais l’ennemi, sentant la défaite inéluctable n’en est que plus cruel et déterminé ; le débarquement a eu lieu en France, les troupes alliées se lancent vers la libération du reste de l’Europe..,)
Le curé s’enfuit avec Renée, la petite juive,  à travers champs et remet l’enfant à des américains. Enfin c’est ce qu’il croit : les deux américains sont des espions allemands déguisés en soldats américains en mission de sabotage…et éliminer d’éventuels juifs qui seraient passés au travers des mailles du filet…
Ce roman est un très beau portrait de cette petite fille si mûre (trop?) et d’un allemand très étrange : à la fois meurtrier et soucieux de protéger Renée, un homme abject (aucun remord sur les nombreux assassinats qu’il a commis) mais également séduisant.

Mathias (Mattew) réussit à se faire passer pour soldat canadien (il est trilingue : allemand par son père, français et anglais par sa mère québécoise et il a lui même passé plusieurs années au Canada) vis à vis des fermiers chez qui ils trouvent refuge…jusqu’à l’arrivée de « vrais » soldats américains…

Les événements historiques montrent une partie de la seconde guerre mondiale finalement peu traitée dans les romans : avec notamment l’opération Greif (une tentative de contre offensive allemande avec déploiement de soldats « déguisés » en soldats américains) et des références à l’opération Eiche (libération rocambolesque de Mussolini en 1943 sur les ordres d’Hitler )

Quand au titre en anglais, sa signification arrive à la toute fin du livre …

Deux extraits :

L’Allemand en queue de file resta interdit devant le geste de l’enfant. Voilà belle lurette qu’il ne voyait même plus les condamnés. Adultes, enfants, vieillards, c’était kif-kif. Des silhouettes sans visage destinées à disparaître. Mais cette fillette, il l’avait vraiment vue : elle avait mangé de la neige. Elle allait mourir. Elle le savait. Et pourtant elle mangeait de la neige, elle apaisait sa soif. Il avait remarqué le geste sûr, rapide, dénué de la moindre hésitation, presque désinvolte, un geste fluide, souple animal. Quelque chose en lui avait remué. Quelque part entre sa poitrine et son abdomen. C’était comme un frémissement infime, une poussée à la fois douce et brutale. Quelque chose de familier. Comme quand il était là-bas, dans les grands bois, dans cette autre vie.

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Et pendant qu’il jouait à l’espion et à l’infiltration, il n’avait guère eu l’occasion de s’embarrasser de ce qui se passait dans les camps d’extermination.
Mais il savait qu’indirectement chacune de ses actions au sein de ses glorieux commandos d’élite réduisait en cendres quelques Juifs, quelques Tziganes, quelques pédés de plus. Sa guerre n’était pas plus propre que celle du soldat qui pousse la vieille Juive hongroise et son petit-fils en loques sur la rampe d’accès à la chambre à gaz. Mathias était un maillon de cette machine de destruction. Il était un des membres de l’ogre affamé. Mais cela ne l’empêchait pas de dormir. Il avait pris ce que le système avait de meilleur à lui offrir, en sachant exactement dans quelle merde il mettait les pieds. Et personne ne l’avait obligé à participer à la danse, il s’était invité tout seul.

 

Les perroquets de la Place d’Arezzo – Eric-Emmanuel Schmitt

Genre : un livre pris au hasard juste pour son titre (et parce que c’est un pavé)
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Dans la première partie, le lecteur est embarqué dans  16 chapitres (environ 179 pages sur 780) avec deux voire trois personnages. Au début, j’ai cru que c’étaient des nouvelles et je suis même allée vérifier que ce roman était bien étiqueté roman dans Babelio.
Le pitch de cette première partie : on découvre tour à tour un couple vivant autour de la fameuse place d’Arezzo (en Belgique) :  des couples de différentes sortes : des soixantenaires qui fêtent leur troisième mariage, un père et une mère de famille de quatre enfants, un écrivain mondialement connu et sa femme, un jardinier et son collègue, une fleuriste acariâtre marié à l’ « idiot » de la place, un étudiant mystérieux, une veuve triste qui se dispute avec sa fille adolescente….A la fin du chapitre, un des deux protagonistes découvre une lettre avec écrit dessus « Ce mot simplement pour te signaler que je t’aime. Signé : tu sais qui. »
Ces histoires sont certaines surprenantes, d’autres moins : quelle variété dans les réactions amoureuses, j’ai globalement été surprise à  peu près par la moitié de ces « présentations » avec une chute à la fin surprenante, ironique, drôle ou cynique.
Après cette « introduction » qui présente les personnages, le roman commence réellement.
A la fin de la première partie, Hippolyte le jardinier (bel hidalgo), achète des fleurs à la fleuriste acariâtre et il va toquer à la porte de celle qu’il désire en secret.
Autour de cette place, les personnages vont se croiser, s’aimer, se détester.
Un couple de gay essaie de mener l’enquête pour trouver la colombe (un corbeau envoyant des lettres  anonymes pleines de fiel alors cet anonyme qui envoie des lettres d’amour est une colombe). C’est parti pour les jeux de l’amour et du hasard de 10 à 60 ans.
Que de fausses pistes dans ce roman : des virevoltes, du sexe, des changements de rythme, saupoudré de quelques drames ….un peu de machiavélisme, des sentiments, du sexe (déjà dit mais il y en a pas mal), des mensonges, des trios amoureux, de la tendresse, de la honte et de l’indignation ….
Un pavé rondement mené 🙂
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Un extrait (p 778 donc quasiment dernière page)   Pour ne pas spoiler le texte entre crochet [] a été changé

– Qu’est-ce que c’était, cette lettre ?
– Une partie de mon roman.
– Quel roman ?
– Celui que je compose.
– Ah oui… Où en es-tu ? Je ne te vois jamais le rédiger. Sur quel cahier ?
– Je ne l’écris pas sur un cahier.
– Sur quoi alors ?
[La colombe] désigna le monde alentour, les façades, les convives, puis précisa :
– Je ne l’écris pas vraiment d’ailleurs. J’ai juste trouvé le début. Après j’ai arrêté parce que j’ai eu peur.
– De quoi ?
– Des personnages. Ils ne font jamais ce que j’attendais. Ils agissent à leur façon. Ils sont bizarres. Je ne les comprends pas.
– Pourquoi ?
– Ils reçoivent une lettre d’amour et ça ne leur fait pas plaisir. Aucun ne réagit pareil.

Le pavé de l’été chez Brize

L’avis d’A propos de livres 

Du côté d’Ostende – Jacqueline Harpman

André, il y a quelques mois, m’avait conseillé « La plage d’Ostende » de Jacqueline Harpman.

Et puis le temps passant, j’avais un peu oublié…
En allant à la bibliothèque, en préparation du mois belge qui a commencé hier, je fus attirée par ce titre « du côté d’Ostende »
J’ai donc lu celui ci en croyant lire celui qu’André m’avait recommandé … ce n’est qu’après le premier quart que je me suis rendue compte de mon erreur (Os tende ! suspend ton vol !)

Non que je sois très déçue du livre que j’ai lu : le narrateur Henri, un vieux monsieur, vient d’apprendre qu’Emilienne son amie de toujours vient de mourir (elle avait dépassé la soixante-dizaine également). Il revient alors sur la vie d’Emilienne qui tomba amoureuse du peintre Léopold Wiesbeck à 11 ans, devint sa maîtresse à 15, se maria avec un autre pour sauver les apparences : une vie entière de second rôle pour Émilienne puisque Léopold ne veut pas quitter son épouse (et son argent)
Le narrateur ne raconte pas seulement les amours d’Emilenne et de Léopold mais un peu ses amours à lui (il est homosexuel et se sera « caché «  toute sa vie, son amitié avec Odette et ses discussions avec le fils de celle ci).

Un livre où il ne se passe pas grand chose mais où les sentiments amoureux sont décortiqués finement …rivalité féminine, passion….contrariée allant jusqu’au suicide, culpabilité, honte …
Un livre que j’ai trouvé à la fois intéressant et un peu « voyeuriste » ou nombriliste….

Ne me reste plus qu’à un lire un livre dont le titre est « La plage d’Ostende » qui raconte mais du point de vue Émilienne la fameuse rencontre et la vie avec le peintre Léopold …la boucle sera alors bouclée …

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Un extrait

Chacun d’entre nous, pauvre fol, se donne sans même y penser le premier rôle dans sa vie. Il est troublant de se retrouver au second plan – que dis-je ? au troisième ! – dans celle des autres. Un personnage entre en scène, on ne sait pas d’où il vient, il dit sa réplique et repart, on ne sait pas où il va. Je me prenais pour un homme modeste : dès que je voyais mon nom sur la page, quelque chose s’éveillait en moi, une attente obscure qui me déplaisait, une tension toujours déçue car je n’étais, pour Emilienne, que le figurant fidèle qui remplit proprement son office. Elle ne s’arrête pour se questionner sur moi qu’une fois, et il me semble qu’elle se trompe. Mais que sait-on de soi ?

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Lu dans le cadre du mois Belge chez Anne 

Ribambelge – Dictionnaire des orpherimes

Ribambelge : nom féminin – une ribambelge est une figure de style mettant en œuvre une accumulation de termes devant forcément avoir un rapport avec la Belgitude –

Cependant l’auteur d’une ribambelge n’est pas forcément belge, ce n’est pas interdit par l’Académie des Orpherimes.

Rime avec Belge – Tour de babelge

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Mais si Joseph Izo était devenu une grenouille de bénitier, que dis-je, un ptérodactyle de nef, un moustique de vitrail, un lézard d’autel, un ver de cierge, un piranha de Calice, une mite de chasuble  ……et cela continue page 184…

Dictionnaires des ribambelges et autres figures de styles – Patience Steinbock – 2017 à propos d’Izo de Pascal de Duve

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Mais venons en rapidement aux célèbres Ribambelges récentes : La ribambelge que je préfère est celle de Jean-Pierre Verheggen sur les poètes peuls, poètes méconnus s’il en est, que je vous invite à lire ou relire ici dans son intégralité :

Dictionnaires des ribambelges et autres figures de styles – Patience Steinbock – 2017

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Dictionnaire des orpherimes : On soulevait ici l’autre jour, et ici précédemment, la grave question des mots sans rime, belge, bulbe, camphre, clephte, dogme, goinfre, humble, meurtre, monstre, muscle, pauvre, quatorze, quinze, sanve, sarcle, sépulcre, simple, tertre et verste. Ce petit dictionnaire donnera chaque jour la définition d’un des mots nouveaux proposés, puisqu’il est bon que chaque mot ait un sens afin que chacun comprenne en l’entendant la même chose que ce qu’à voulu dire son interlocuteur. Quant aux citations, s’agissant d’illustrer des néologismes, le lecteur comprendra qu’il a été nécessaire d’améliorer nos sources. * à suivre, avec l’aide des collaborateurs bénévolontaires.

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L’aventure quotidienne des orpherimes aoûtiennes est terminée 😦

Il m’en reste quelques unes en stock (je vais essayer de prendre un rythme hebdomadaire …mais ce n’est pas gagné 🙂