Le loup des steppes – Hermann Hesse

Préface : un jeune homme vit chez sa tante et raconte l’arrivée d’un locataire Harry Heller chez celle ci (elle a une grande maison et loue des chambres). Ce mystérieux homme se surnomme lui même le loup des steppes par autodérision : il ressent en lui deux personnalités : la première animale (le loup) qui est solitaire et misanthrope et la deuxième « humaine » qui souhaite communiquer avec ses semblables. Il a la cinquantaine, il est malade, ne travaille pas, lit énormément …

Ce livre oscille en permanence entre la réalité et le fantastique : Harry Heller (H.H. comme Hermann Hesse) se promène la nuit dans les rues avec son vague à l’âme et découvre un théâtre « magique » qui apparaît et disparaît au gré de ses pérégrinations.
Après un moment très sombre (la description de ses tendances suicidaires), il rencontre une jeune femme mystérieuse (à moins que ce ne soit un dédoublement de personnalité…) qui dit se prénommer Hermine (double féminin de Hermann ? )
Il s’agit d’un auteur allemand (naturalisé suisse) et je me suis demandé si Hermine avait la même signification qu’en français ou si ce prénom avait été choisi pour sa sonorité proche de Hermann…

Cette jeune femme tente de réconcilier Harry avec la vie et ses plaisirs (en particulier la musique et la danse), Harry, cinquantenaire coincé vit une seconde jeunesse…

Hermine sauvera-t-elle le loup des steppes de sa folie ?

En conclusion : un livre très riche tant par les sujets abordés : j’ai évoqué le suicide, l’amour mais il y a aussi l’art (musique), la volonté de paix et la critique des Etats qui s’engagent sûrement vers la deuxième guerre mondiale (ce livre a été écrit en 1927 et interdit sous le régime nazi).

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Un extrait

Il existe un assez grand nombre de personnes semblables à Harry. Beaucoup d’artistes notamment possèdent le même type de personnalité. Ces êtres ont deux âmes, deux essences. En eux, le divin et le diabolique, le sang maternel et paternel, l’aptitude au bonheur et au malheur coexistent ou se mêlent de manière aussi conflictuelle et confuse que le loup et l’homme chez Harry. Dans de rares instants de félicité, ces hommes menant une existence fort agitée éprouvent également un sentiment d’une intensité extrême, d’une indicible beauté. Parfois même, l’écume de ce court ravissement jaillit si haut, elle est d’une blancheur si éblouissante au-dessus de l’océan des souffrances, que le bonheur éclatant irradie vers les autres, les touche et les envoûte. Ainsi naissent, telle l’écume précieuse et éphémère de la joie sur les flots de la douleur, toutes ces œuvres d’art à travers lesquelles un individu malheureux s’affranchit pour un heure de sa destinée, atteignant une telle hauteur que sa félicité luit comme une étoile et semble, aux yeux de ceux qui l’aperçoivent, refléter quelque chose d’éternel, un rêve de bonheur.

Livre lu dans le cadre du Challenge chez Madame lit, le thème d’octobre  est : un roman fantastique 

Et avec un jour d’avance :-), participation aux   « feuilles allemandes » organisées par Eva en novembre 

Que lire un 27 octobre ?

« Cette fois, dit Mack, il faut qu’on soye bien sûrs qu’il assistera à la fête. Sans lui pas de fête!
– Cette fois, où c’est qu’on la donnera, la fête ? demanda Jones. »
Mack repoussa son fauteuil jusqu’au mur : « Tu parles si j’y ai pensé ! On pourrait la donner ici, bien sûr, mais pour l’effet de surprise, y en aurait pas ! Et c’est pas tout. Doc, y a rien au-dessus de son chez lui. Et puis, y a sa musique… » Il inspecta la pièce autour de lui : «J’aurais voulu savoir qui c’est qui y a cassé son phonographe, la dernière fois. Mais la prochaine, ç’ui qu’aura le malheur de mettre le doigt dessus !…
– C’est chez lui qu’il faut faire la fête », décrit Hughie.
L’annonce officielle de la fête n’avait pas été faite, aucune invitation n’avait été lancée, mais tout le monde y pensait, et chacun se proposait d’y aller. 27 octobre. On se répétait à part soi : «Le 27 octobre !» Et comme c’était une fête d’anniversaire, il fallait penser au cadeau.
Les filles de chez Dora, par exemple. Pas une qui n’eut été voir Doc, à un moment ou à un autre, soit pour prendre un médicament, soit pour le consulter, ou lui tenir compagnie. Elles avaient vu le lit de Doc. Il était recouvert d’une vieille couverture rouge, bordée de queues de renards, et pleine de sable, car il l’emportait avec lui dans ses expéditions côtières. Il se ruinait en équipement de laboratoire, mais l’idée ne lui serait jamais venue de s’acheter un couvre-pieds neuf. Les filles de chez Dora lui confectionnaient en secret un magnifique couvre-pieds. Tout brodé, diapré de mille couleurs, du cerise, du jaune pâle, du vert Nil, du rose chair, car elles employaient pour le faire leurs robes du soir et leur lingerie. C’est le matin qu’elles y travaillaient, et au début de l’après-midi, avant l’arrivée des matelots de la flotte sardinière. Unies par la communauté de l’effort, les filles en oubliaient leurs jalousies et leurs querelles.

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Rue de la sardine – John Steinbeck

Que lire un 25 octobre ?

Le 25 octobre 1784, le vaisseau l’Intrépide, monté de vingt canons et de douze porte-mousquetons, quitta le port de Baltimore.
Auguste Benjowski était à bord, avec Aphanasie et leur fils. Le navire avait été affrété par une compagnie commerciale américaine. L’intervention de [Benjamin] Franklin avait été déterminante pour obtenir son soutien. Il avait su persuader ces marchands que l’Indépendance allait les priver de leurs privilèges de colonie et désorganiser leurs échanges avec l’ancienne métropole ; ils devaient donc trouver de nouveaux partenaires.
La mission dévolue à l’Intrépide était de créer un établissement sur la côte est de Madagascar et de mettre en place un circuit d’échanges avec l’Amérique.
Auguste, à son grand regret, n’avait pas réussi à recruter en Amérique les charpentiers, maçons, forgerons, vignerons, sur lesquels il comptait pour enrichir Madagascar et la développer. Il avait du se contenter de personnes sans aveu, auxquelles il avait de surcroît fait miroiter l’acquisition de grands domaines et une prospérité qu’ils seraient sûrement déçus de ne pas trouver. Il aurait toujours le temps de voir sur place ce qu’il en ferait.
Il avait par ailleurs assemblé une poignée de compagnons très sincères et plein d’idéal. Certains avaient fui du Kamtchatka avec lui. D’autres étaient des Polonais qui avaient combattu pour l’Indépendance américaine. Tous partageaient son idéal de créer, à l’image des États-Unis, une colonie libre en Afrique.
Ils allaient quitter le climat changeant et souvent rude de la Nouvelle-Angleterre pour la terre ensoleillée et douce de Madagascar.
L’ambiance à bord de l’Intrépide était à la nonchalance. Chacun savait que le voyage serait long. Le mouvement lent du navire, sous les immenses toiles gonflées de vent, berçait les esprits et faisait rêver certains ce qu’ils allaient découvrir, d’autres à ce qu’ils allaient perdre.
Même les marins étaient saisis par le vague à l’âme. Sitôt entrés dans la Caraïbe, la brise douce, l’air tiède, le soleil cuisant amollirent les cœurs et laissèrent chacun dériver au gré de ses fantasmagories intérieures.
Est-ce ce relâchement qui fit commettre au capitaine une erreur d’estime ? Nul ne le sait mais le fait est que le navire, parti pour traverser l’Atlantique, se retrouva au Brésil où il échoua sur l’île de Juan Gonsalvez, près de l’embouchure de la rivière Armagosa. Cette escale forcée à l’équateur dura plusieurs mois.
Le temps passait lentement. Les seules promenades que les naufragés pouvaient faire les menaient le long des mêmes interminables plages sur le sable desquelles la mer jetait des fibres et des cailloux polis. Le petit Charles était en âge d’apprendre et Auguste lui faisait la leçon à bord du bateau. La sueur de l’élève avec celle du maître coulaient sur les pages imprimées et troublaient la prose de Descartes comme celle de Rousseau. En fin d’après-midi et avant que la nuit équinoxiale ne tombe d’un coup, le père et le fils s’affrontaient sur la plage à l’aide de bambous qu’ils maniaient comme des épées. On avait débarqué les chevaux que le navire transportait dans ses soutes. Charles appris à monter et il y prit un si vif plaisir qu’il disparaissait des journées entières sur sa jument alezane.
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Le tour du monde du roi Zibeline – Jean-Christophe Ruffin 

Que lire un 25 octobre ?

Ondes matrimoniales

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Un 25 octobre, dans les années soixante-dix. Pierrette P. mit les petits plats dans les grands pour recevoir son chéri, un certain Raoul. Il se régalèrent en vitesse d’huîtres et de gigot, puis ils s’accouplèrent sur le canapé du salon et Raoul partit peu avant minuit rejoindre Madame Légale.
Il ne revint pas. Sans doute avait-il beaucoup de travail, à moins qu’il n’ait changé de région, sans compter que sa régulière pouvait l’avoir placé sous surveillance. Dorénavant, il manifestait sa tendresse en envoyant à Pierrette P. des ondes abdominales amples et douces. En son honneur, elle dresse une belle table de deux couverts tous les 25 octobre, et dîne seule en guettant les ondes. Voilà trente ans maintenant qu’ils vivent cette liaison originale et miraculeusement préservée des chicanes qui, d’ordinaire, obscurcissent la vie des couples. Si on demande à Pierette P. pourquoi elle n’a jamais cherché à revoir Raoul depuis tout ce temps, elle répond en rosissant qu’elle aurait trop peur d’apprendre que tout était fini entre eux.

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Emmanuel Venet – Précis de médecine imaginaire

Que lire un 17 octobre ?

Un mois a passé depuis le début de mon journal. Je me souviens de la troisième promesse d’Éric. Mais plutôt, encore, je me souviens de mes débuts parisiens. Une année après mon arrivée en France, lors d’une promenade le long de la Seine, sous une Notre-Dame menaçante, Éric m’avait raconté le massacre des Algériens du 17 octobre 1961 par la police française. Il m’avait dit que la manifestation pacifique n’avait pas empêché l’utilisation de matraques et d’armes à feu contre des hommes et des femmes, tués et jetés, toute la nuit dans la Seine. Il m’avait confié, que malgré ce passé atroce, sa place de Français–Algérien–Berbère–fils de harkis était ici, où il pouvait recoudre le passé dans le présent.
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Je suis quelqu’un – Aminata Aidara

Que lire un 16 octobre ?

Le 16 octobre, un grave accident avait eu lieu dans les mines de Yûbari, dans le Hokkaidô. Un incendie s’était déclaré dans les galeries d’extraction, à mille mètres sous terre. Plus de cinquante mineurs étaient morts par asphyxie. Comme le feu s’était propagé sur des zones proches du sol, dix autres personnes avaient perdu la vie. Pour empêcher la propagation du feu, la société avait inondé les galeries de la mine à l’aide d’une pompe sans vérifier s’il restait ou non des survivants au fond. Au total, le sinistre avait fait quatre-vingt-treize victimes. Une véritable tragédie. Le charbon est une source d’énergie «sale». Son extraction dangereuse. La société minière avait rechigné à investir dans les équipements et les conditions de travail étaient mauvaises. Les accidents nombreux. Les poumons atteints à coup sûr. Mais, en raison de son faible coût, il restait toujours des hommes et des entreprises qui en avaient besoin. Aomamé avait un souvenir précis de cet accident.

L’affaire qu’elle recherchait s’était produite le 19 octobre, alors qu’il y avait encore des répercussions de l’accident de la mine de Yûbari. Aomamé ne savait rien de cet événement – que Tamaru venait de lui évoquer, quelques heures auparavant. Il était pourtant invraisemblable qu’elle n’en ait pas eu connaissance. Le titre, en une de l’édition du matin, était imprimé en gras et en gros caractères. Impossible de le louper.

TROIS POLICIERS TUES DANS LES MONTAGNES DE YAMANASHI AU COURS DE COMBATS CONTRE DES EXTREMISTES.

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1Q84 – Livre 1 – Haruki Murakami 

Les furies – Lauren Groff

C’est grâce à un message d’Antoinette qu’une idée lui vint, un petit article découpé dans un magazine au sujet de Han Van Meegeren, ce faussaire qui avait réussi à convaincre le monde entier que ses propres tableaux étaient de Vermeer, bien qu’il ait donné à tous ses Jésus son propre visage. Antoinette avait entouré la radiographie d’un faux tableau où, à travers le visage fantomatique d’une fillette, on voyait apparaître l’image peu inspirée du XVIIe siècle par-dessus laquelle Meergeren avait peint : une scène de ferme, avec des canards et des abreuvoirs. Une image fausse recouvrant une mauvaise base. Cela me rappelle quelqu’un, commentait Antoinette.
Mathilde se rendit à la bibliothèque un week-end où Lotto était parti camper dans les Adirondacks avec Samuel et Chollie, virée qu’elle avait elle-même organisée pour être tranquille. Elle trouva la reproduction qu’elle cherchait dans un gros livre. Au premier plan, un magnifique cheval blanc portant un homme en robe bleue, une foule confuse de têtes et de chevaux, un étonnant bâtiment sur une colline, sur fond de ciel. Jan Van Eyck, avait-elle découvert quelques années plus tôt à l’université. Quand on leur avait montré la diapositive en cours, son cœur s’était arrêté.
Mon Dieu, elle l’avait tenu entre ses mains dans la minuscule pièce sous l’escalier chez son oncle. Elle l’avait humé : bois ancien, huile de lin, siècles lointains.
« Volé en 1934, avait annoncé le professeur. Ce panneau appartenait à un retable. On pense qu’il a été détruit il y a fort longtemps. » Il montra ensuite une autre diapo représentant un chef-d’œuvre volé, mais elle n’avait plus que des étoiles dans les yeux.
À la bibliothèque, elle paya pour faire une photocopie en couleur et tapa une lettre. Pas de salutations. Mon oncle*, commença-t-elle.
Elle envoya par courrier la photocopie et la lettre.
Une semaine plus tard, elle préparait des spaghettis et du pesto, tandis que sur le canapé Lotto fixait Fragments d’un discours amoureux d’un œil vague, respirant par la bouche.
Il décrocha quand le téléphone sonna. Écouta. « Oh, bonté divine, dit-il en se levant. Oui, Monsieur. Oui, Monsieur. Oui, Monsieur. Bien sûr. Je ne pouvais me réjouir davantage. Demain, à neuf heures. Oh merci. Merci. »
Elle se retourna, une cuillère fumante à la main. « Qu’est-ce qui se passe ? »
Il était pâle et se frottait la tête. « Je ne sais pas. » Il se rassit lourdement . Elle s’approcha, s’agenouilla devant lui, le prit par les épaules. « Chéri ? Il y a un problème ?
– C’était Playwrights Horizons. Ils veulent monter Les sources. Un producteur privé en est dingue et il est prêt à payer. »
Il appuya la tête contre Mathilde et fondit en larmes. Elle embrassa ses cheveux pour dissimuler son expression, qui, elle le savait, était sombre, féroce.
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Les furies – Lauren Groff

Les furies – Lauren Groff

Premier chapitre : Lotto et Mathilde ont 22 ans. Ils viennent de se marier (ils se connaissent depuis 15 jours) et font l’amour pour la première fois sur la plage….Ce livre retrace leur amour…

La première partie raconte le point de vue de Lotto sur leurs 23 ans de mariage : ses débuts comme comédien (raté) puis son succès de dramaturge, son rapport au théâtre, à sa mère (quelle plaie !!)
Le fil rouge est sa passion pour Mathilde que l’on sent secrète, distante ….

La deuxième partie repart au début de l’histoire mais avec comme point de vue Mathilde : on revit tout : la rencontre en soirée étudiante, le mariage, la première confrontation avec Belle-maman …cela peut sembler lassant comme procédé mais pas du tout : dans la première partie on apprend tout de l’enfance de Lotto et dans la deuxième c’est l’enfance de Mathilde qui est décortiquée ; les scènes que l’on croit avoir déjà vues se retrouvent comme par magie éclairées d’un autre éclat (parfois complémentaire et parfois à l’opposé)

J’ai beaucoup apprécié la première partie (4*, quelques extraits des pièces de Lotto m’ont paru bien absconses) et la deuxième partie m’a enthousiasmée (5*) : Mathilde-Aurélie nous livre ses secrets et la jeune femme si distante (presque glaciale) de la première partie s’humanise : j’aurai aimé la serrer dans les bras et la consoler ….Lui dire qu’elle n’est pas le monstre qu’elle croit être…

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Deux extraits

 Elle se surprit à penser que la vie avait une forme conique, le passé s’évasait à mesure qu’il s’éloignait du moment présent, à la pointe du cône. Plus on vivait, plus la base s’élargissait, de sorte que des blessures et des trahisons, quasi imperceptibles au moment où elle s’était produites, s’étiraient comme des points minuscules sur un ballon de baudruche qu’on gonfle peu à peu. Une petite tache sur l’enfant frêle se transformait en une difformité énorme sur l’adulte, impossible à franchir et aux bords frangés.

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– Il est temps. Grand temps. On a de l’argent à présent, une maison, tu es encore fertile. Tes ovules sont peut-être un peu ridés, j’en sais rien. Quarante ans. On risque d’avoir un rejeton déjanté du bulbe. Mais c’est peut-être pas si mal d’avoir un petit attardé. Quand ils sont intelligents, ils se tirent dès qu’ils le peuvent. Un retardé reste plus longtemps. D’un autre côté, si on attend trop, à quatre-vingt-treize ans on lui découpera encore sa pizza. Non, il faut s’y mettre tout de suite. Dès qu’on rentre à la maison, je te féconde fissa.
-Voilà sans aucun doute la chose la plus romantique que tu m’aies jamais dite.

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Un livre repéré chez Kathel

 

Sur les ossements des morts – Olga Tokarczuk

Prix Nobel de Littérature 2018 🙂

Un excellent souvenir

Une auteur que je n’ai pas relue (car absente de ma bibliothèque municipale…)

La jument verte

ossementsmorts

Janina, retraitée, est la narratrice. Elle vit dans un coin reculé de la Pologne, frontalier avec la Tchéquie. Elle donne aussi quelques cours d’anglais à des enfants et est gardienne de maisons pendant le rigoureux hiver de cette contrée. Tous les jours, elle fait donc la tournée des résidences secondaires dont elle a la charge. Le lecteur va emboîter le pas de Janina et suivre toutes ses pensées. (Enfin presque)
Je dois dire que la façon de raisonner de Janina est à la fois charmante, désuète, loufoque et givrée. Elle est parfois sensée et parfois en parfait décalage avec la réalité. Elle est férue d’astrologie et étudie beaucoup les planètes.
Elle découvrira le cadavre de son voisin Grandpied, ainsi que plusieurs autres….
La police semble impuissante à arrêter quiconque, que ce soit des meurtriers ou des braconniers. Dans cette campagne, le gibier pullule et les braconniers encore plus.

Janina, Don…

Voir l’article original 393 mots de plus

Bleu de prusse – Philip Kerr

Je connaissais le nom de l’auteur pour sa fameuse trilogie berlinoise que je n’ai toujours pas lue (je crois qu’il fait un peu plus de 1000 pages en poche). Celui-là fait 610 pages. Absolument passionnantes, les pages : il y a deux histoires en parallèle.
L’action commence en 1956, l’ex-commissaire Bernie Gunther est employé dans un grand hôtel à Nice. Dans cette introduction il mentionne d’anciennes enquêtes,  et je me suis dit que c’était une mauvaise idée de lire ce livre sans avoir lu les précédents et puis après quelques chapitres cette impression a disparu : On peut réellement lire ce livre sans connaître les enquêtes déjà parues.

Bernie Gunther commence alors une cavale à travers la France pour échapper aux sbires de la Stasi qui sont à ses trousses. Parmi ses poursuivants se trouve son ancien adjoint ce qui lui fait se remémorer une enquête réalisée en 1939 :
Pour les trois quarts du livre l’histoire se passe donc en 1939, en avril, à Berchtesgaden et à Berlin : un meurtre d’un ingénieur civil a été commis sur la terrasse de la résidence d’Hitler (en son absence). Heydrich demande à Bernie Gunther de découvrir le coupable en moins d’une semaine ; Hitler devant venir passer quelques jours dans son nid d’aigle. C’est donc une course contre la montre qui s’engage avec pléthore de suspects, de méchants, de fausses pistes, de coups de feus et de menteurs.
L’intrigue est haletante et le personnage de Bernie est un des rares personnages à avoir le sens de l’humour et aussi une honnêteté sans faille.

La guerre semble inéluctable pour tout le monde et on assiste aux différentes réactions (majoritairement des personnes qui souhaitent cette guerre)

De temps en temps, on retrouve Bernie Gunther en 1956, ce qui nous montre le chemin parcouru et les relations franco allemandes, une dizaine d’années après la fin de la guerre…

Finalement le bleu de Prusse du titre a deux significations une en 1939 et une en 1956 , significations que je vous laisse découvrir (pour ma part je file regarder combien il existe d’enquêtes de Bernie Gunther…)

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Un extrait :

J’ai toujours été un grand lecteur, depuis tout petit. Mon livre préféré était Berlin Alexanderplatz, d’Alfred Döblin. J’en avais un exemplaire chez moi, à Berlin, enfermé dans un tiroir car c’était un livre interdit, évidemment. Les nazis avaient brûlé nombre d’ouvrages de Döblinen 1933, mais très souvent, je ressortais mon exemplaire dédicacé de son œuvre la plus célèbre pour revivre la bonne vieille époque de la République de Weimar. En vérité, je lis de tout. Absolument tout. J’ai lu tout ce qu’il y a qui va de Johann Von Goethe à Karl May. Il y a quelques années, j’ai même lu le livre d’Adolf Hitler, Mein Kampf (mon combat). Je l’ai trouvé pugnace, comme on pouvait s’y attendre, mais également perspicace, ne serait-ce qu’au sujet de la guerre. Je ne suis pas critique littéraire, mais à mon humble avis il y a toujours quelque chose à tirer d’un livre, même mauvais. Par exemple, Hitler écrivait que les mots construisent des ponts dans des régions inexplorées. Il s’avère qu’un enquêteur fait la même chose, même si parfois il peut regretter de s’être aventuré dans ces régions. Hitler écrivait également que les grands menteurs sont de grands magiciens. Un bon enquêteur est aussi une sorte de magicien, capable à l’occasion de rassembler ses suspects dans une bibliothèque de manière théâtrale et de leur arracher une exclamation de surprise en faisant son numéro de magie révélatrice. Hélas, ça n’arriverait pas ici. Hitler affirmait par ailleurs que la vérité importe peu, seule la victoire compte. Je sais que beaucoup de flics pensent la même chose, or, pour moi, il n’y a pas plus de belle victoire que la vérité.

Challenge polar chez Sharon