Métamorphose

Douarnenez – 15 février 2368

Je suis le leader d’un groupe baptisé « Les éléphants Blancs ». Vous allez me demander pourquoi ce nom ? ben oui d’accord c’est un peu ringard, maintenant que les éléphants blancs (et tous les éléphants d’ailleurs) ont disparu de la terre depuis un siècle, mais bon on avait besoin du nom d’un groupe et à ce moment là, Cyndy, la chanteuse du groupe, ma petite amie, lisait un bouquin intitulé « le rapt de l’éléphant blanc » de je sais plus qui ! Et comme on fait du rap avec le groupe , voilà rapt, rap …on s’est retrouvé tous les trois baptisés « les éléphants blancs ».

Comme a dit mon père, toujours subtil : « c’est du lourd, dommage que tu ne lisais pas « la vengeance du wombat  » , Cyndy, parce que « les Wombats » comme nom de groupe ça aurait eu de la gueule…. » Il est bizarre parfois mon père, souvent, il faut que j’aille lire ensuite les mots qu’il utilise sur g**gle.world : « Wombat petit marsupial disparu au début du vingt deuxième siècle » et après il faut que je cherche marsupial et là ça me fatigue et je laisse tomber….Alors j’ai déclaré dédaigneusement à mon père « tu ne jugeras point !  » et je l’ai planté là. Des fois je me demande si j’ai des gènes en commun avec lui ou si j’ai été échangé à la maternité….

Mais revenons à nos moutons….

Samedi, on répétait donc tranquillement dans une grotte à Douarnenez, joli port de pêche, les pieds dans l’eau à 25 degrés (j’adore le réchauffement climatique) : il y avait Cyndy – teint rose, peau de pêche ; BIG MC aux samples – baraqué mais un peu mou au niveau des abdos, et votre serviteur Tanguy 17 ans, chanteur et bassiste. On répète dans une grotte pour que des espions ne nous piquent pas nos chansons. Le grand secret de notre future réussite c’est l’originalité de nos paroles.

Cela faisait quelques jours que je n’étais pas trop en train : en prenant ma douche, j’avais bien repéré que ma peau devenait rouge, plutôt écrevisse que poisson d’ailleurs pour vous situer. Cela me grattait les lombaires, cela me picotait les doigts et me brûlait les yeux. J’avais demandé aux deux autres si cela leur faisait pareil. Cyndy avait dit « ouais, c’est pareil, cela date du dernier orage ordinaire d’il y a une huitaine », BIG MC avait lâché, médusé : « idem, cela me gratouille l’abdomen ». Bref, selon les apparences, le groupe au complet n’était pas au top de sa forme.

Je me suis donc couché hier soir, patraque en ce jour de pleine lune, et au réveil je ne suis pas arrivé à me mettre sur mes pieds. J’essayais et je retombais, j’ai fini par m’échouer sur le plancher de ma chambre et je me suis traîné jusqu’à la salle de bain, qui avait pris des proportions gigantesques : j’avais vraisemblablement rétréci, je voyais tout flou et ne distinguais même pas le bout de mes pieds, je crois même que je n’avais plus de pieds ni de bras , l’horreur …..d’autant plus que j’étais sûr de n’avoir rien consommé d’étrange la veille (mon père ayant planqué toutes nos cigarettes dans la réserve).

Je ne devais pas faire maintenant plus de 50 centimètres de hauteur, je n’arrivais même pas à la moitié de la colonne du lavabo. En grimpant à tâtons sur la baignoire, j’ai réussi à me voir en entier dans le miroir …je flippais comme un malade en me demandant, si je ne m’étais pas métamorphosé en loup-garou, because la pleine lune si vous suivez. Enfin après beaucoup d’efforts, j’ai réussi à me voir dans le miroir ! Enfin me voir, c’est vite dit parce que je ne me suis pas reconnu : J’avais la carapace d’une langouste, deux yeux à facettes, deux cornes frontales triangulaires, deux petites antennes par ci , deux antennes dirigées vers l’arrière par là, deux mandibules et quatre mâchoires à lames coupantes. Je crois n’avoir rien oublié sur la tête. Pour le reste à partir du thorax, j’ai compté trois paires de pattes-mâchoires et cinq paires de pattes locomotrices (si j’ai bien compté, parce que à un moment j’ai un peu perdu le fil dans toutes ses pattes). Et surtout je n’avais pas changé que physiquement je me sentais différent aussi psychologiquement, j’avais en moi comme une sorte de fureur qui ne demandait qu’à sortir. Un bon titre rap ça : « la fureur de la langouste » !

Là dessus, encore tout ému, j’ai entendu gratter à la porte, j’ai ouvert avec mes nouvelles antennes (cela m’a pris un moment, parce que tout petit déjà je n’étais pas un champion de la coordination oeil -main, ce n’est pas moi qui le dit, c’est ma mère, alors vous pensez avec le nombre de pattes que je dois gérer maintenant!) .Je me suis pris un paquet d’eau salée sur la tête mais cela ne m’a même pas gêné, c’est plus facile pour moi de nager maintenant que de marcher. Derrière la porte vous savez qui il y avait ?

La crevette rose, je l’ai reconnue tout de suite : Cyndy a gardé ses yeux rêveurs, Big MC était une méduse, avec tous plein de filaments brillants et un ventre rebondi. En sortant de la maison, en nageant entre deux eaux, nous avons croisé ma mère, une palourde échouée sur la plage à découvert..

Nous avons vogué de concert tous les trois, en scrutant les nuages et en nous enthousiasmant sur les belles choses que porte le ciel et la mer.

Et mon père vous me direz ? Et bien, nous l’avons retrouvé un peu plus tard pagayant frénétiquement sur un morceau de bois, ballotté par des flots ; l’eau avait beaucoup monté et Douarnenez ne ressemble plus du tout à ce que c’était avant. Mon père a crié « Tanguy, aide moi !  » mais moi je me suis tiré avec mes amis et d’abord je ne parle pas le Wombat.

Texte inspiré par une double consigne chez Gwenaëlle

celle du 1 février où il fallait écrire un texte en incluant le titre des dix derniers livres lus  

1 Le rapt de l’éléphant blanc de Marc Twain
2 La fureur de la langouste de Lucia Puenzo
3 A découvert d’Harlan Coben
4 Le loup garou de Boris Vian
5 La réserve de Russel Banks
6 Le grand secret de R Barjavel
7 Orage ordinaire de William Boyd
8 Tu ne jugeras point d’Armel Job
9 Les belles choses que porte le ciel de Dinaw Mengestu
10 Les apparences de Gillian Flynn

et celle du 15 février intitulée « Métamorphoses nocturnes »

Liberté pour les ours – John Irving

LIBERTE POUR LES OURS

L’histoire en quelques mots : Vienne (Autriche) 1967. Sig et Graff , deux jeunes gens d’une vingtaine d’années, se rencontrent chez le garagiste. Ils décident de faire une virée en moto et de libérer les animaux du zoo (d’où le titre) .

Ce livre est le premier de John Irving (il avait 25 ans lors  sa parution). Il est à la fois déjanté et très instructif.

La première partie raconte le périple de Sig et Graff, (vue par Graff), dans le zoo, puis sur la route. En chemin, ils rencontrent une jeune autrichienne dont Graff (à moins que ce ne soit Sig) tombe amoureux. Mais la tante de la demoiselle veille….

Dans la deuxième partie, on en apprend beaucoup sur Siegfried (Sig) Javotnik qui devient le narrateur. Les chapitres alternent entre l’Autriche en 1938-1945 et vingt ans plus tard, pour nous expliquer comment l’idée saugrenue  de libérer les animaux du zoo est venue à Sig. C’est Siegfried qui raconte sa vision de la vie de ses parents en Autriche, juste avant l’Anschluss et la guerre mondiale en Autriche, Serbie …Les gens qui disparaissent, sont arrêtés, précipités sur les routes par la guerre.

La troisième partie remet Graff au centre de l’action, il essaie de réaliser le rêve de son ami en libérant les animaux du zoo.

La deuxième partie est celle qui m’a le plus plu, alternances de sujets très sérieux – la guerre, avec des moments carrément burlesques : certains passages, malgré la gravité du moment et l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne en 1938, sont hilarants.

En conclusion : un très bon moment de lecture à la fois drôle et sérieux qui fait découvrir une vision de la seconde guerre mondiale que je ne connaissais pas du tout.

Un extrait du début du périple de Sig et Graff : ils viennent de partir en moto et font une pause auprès de la rivière Ybbs, pêchent des truites, dorment à la belle étoile.

Alors le soleil et la bière règlent notre sommeil. Les ours à lunettes s’embrassent en chuchotant, et l’oryx chasse de la prairie tous les petits enfrottés débiles. Sur la Ybbs vioalacée comme une meurtrissure, le morse descend en canot ; il rame avec ses nageoires, se fait dorer les défenses au soleil et décolorer la moustache ; il ne voit pas l’hippopotame embusqué dans un trou près de la rive – il s’est déguisé avec un voile de mousse et il a la gueule béante, prête à engloutir le morse, corps et biens.

Je me suis réveillé pour avertir le morse. Les girafes avaient brouté la prairie jusqu’au soleil pour le faire descendre. Il brillait de ses derniers feux au ras de l’herbe, accrochait la moto et étirait l’ombre de ses roues et de son moteur par-dessus la rivière ; elle, elle roulait sous la moto comme une route qui file, violacée..

– Il est temps de mettre les voiles, Siggy.

– Tout doux. Je les regarde sortir de leurs cages. Ils sont libres comme nous.

Alors je l’ai laissé regarder un moment, et moi j’ai regardé le soleil aplatir la prairie rouge, et la rivière s’éteindre. J’ai jeté un coup d’oeil en amont, mais on n’apercevait pas encore les montagnes. (p 41)

Livre lu dans le cadre d’une lecture commune avec Denis et Noctenbule

CHALLENGE-animaux

Challenge de Sharon Animaux du monde

Ce livre est fabuleux pour la mise en scène des animaux (malheureux les animaux car enfermés)