Volkswagen Blues – Jacques Poulin

vwblues

L’histoire en quelques mots : Jack est écrivain. La quarantaine, il décide de se mettre à la recherche de son frère, Théo,  qu’il n’a pas vu depuis 15 ans. Il part donc en Combi Volkswagen du Canada (de Gaspésie pour être précise) pour suivre une piste ténue, qui consiste juste en une carte postale envoyée par Théo. Avec le recul, Jack y voit un appel au secours. Il rencontre une jeune femme, métisse,  qu’il surnomme vite la Grande Sauterelle, en rapport avec ses longues jambes.  Ils vont ainsi tous deux se lancer dans un périple : Québec, Montréal, Détroit, Chicago, Saint Louis, Les Rocheuses, San Francisco.;

Mon avis : il s’agit d’un livre très introspectif, même si les rencontres faites par le couple sont assez nombreuses.  Jack se cherche, il est même, j’ai trouvé, plutôt dépressif. La jeune femme ne s’accepte pas telle qu’elle est , d’un père blanc et d’une mère indienne : elle ne se sent à l’aise ni d’un côté ni de l’autre. Comme elle répond à une question de Jack  « Quand on est sur la route, je suis heureuse ». Ce voyage sur la trace de ce frère, passionné d’histoire des Etats Unis est l’occasion pour tous deux de réfléchir à leur vie et de l’impulsion qu’ils veulent lui donner. Leur quête ne concernent pas que leur propre vie mais ils sont soucieux de comprendre ce qui s’est passé à l’époque des pionniers : la guerre contre les Sioux, l’extermination des bisons pour affamer les populations indiennes. …..Un livre qui prône la liberté et l’espace.

En conclusion  : de très beaux passages, mais je suis un peu restée en dehors de l’histoire. Peut-être, l’effet des kilomètres avalés et pas énormément de petites histoires du quotidien mais plutôt des allusions à l’Histoire, avec un grand H.

Une carte à la fin du livre  montre le périple réalisé sur une saison. Impressionnant !

Extrait :

L’homme aimait beaucoup le vieux Volks.

Lorsqu’il l’avait acheté, l’année où il avait obtenu un prix littéraire, le Volks était déjà vieux de quatre ans et rongé par la rouille. Il avait refait presque toute la partie inférieure de la carrosserie en utilisant des feuilles de tôle galvanisée qu’il avait découpées, recourbées et fixées avec des rivets, puis il avait repeint le véhicule avec une peinture antirouille. La tôle épaisse et les gros rivets donnaient au minibus une allure de camion blindé. Sous la nouvelle tôle, cependant le rouille continuait à faire son œuvre et on pouvait le constater lorsque le Volks quittait un espace de stationnement : il laissait sur le sol une fine poussière de métal rouillé.

De vieillis factures, que Jack avait trouvées dans le coffre à gants en faisant le ménage, révélaient que le Volks avait été acheté en Allemagne ; il avait parcouru l’Europe et traversé l’Atlantique  sur un cargo, ensuite il avait voyagé le long de la côte Est , depuis les Provinces Maritimes jusqu’au sud de la Floride. Au fonds d’un compartiment à bagages, on voyait des coquillages et des pierres de couleur. Dans l’armoire qui se trouvait à l’arrière de la banquette , il y avait une odeur de parfum bon marché qui se répandait parfois dans le véhicule la nuit, lorsque le temps était chaud et humide. Et on remarquait ici et là, sur les murs  ou à l’intérieur des portes d’armoire en contre-plaqué, toutes sortes de graffiti ; une mystérieuse inscription n allemand, sous le pare-soleil du conducteur, se lisait comme suit : Die Spache ist das Haus des Seins.

Sans doute à cause de son âge, le Volks avait ses habitudes et ses manies. Par exemple, les ceintures de sécurité : une fois qu’elles étaient bouclées, il était très difficile de les détacher et on avait l’impression que le Volks ne voulait pas se résigner à laisser partir les gens. De même, les essuie-glace : ils s’arrêtaient quand on fermait le bouton de commande, mais tout à coup, mus par la crainte d’avoir oublié quelque chose, ils se remettaient en marche et faisait un tour supplémentaire avant de s’arrêter définitivement. Mais la principale caractéristique du minibus était qu’il n’aimait pas du tout se faire bousculer. Tant qu’il n’était pas réchauffé, le matin, il aimait mieux rouler à vitesse réduite.

En tout circonstance, il avait horreur qu’on le pousse au-delà de sa vitesse de croisière, qui était de cent kilomètres à l’heure, et le conducteur impatient qui dépassait cette limite pouvait s’attendre à toutes sortes de protestations : le pare-soleil tombait soudainement et lui masquait la vue, ou bien le toit se décrochait et menaçait de se soulever, ou encore le moteur ou la boîte de vitesses faisaient entendre des bruits suspects.

Le vieux Volks avait parcouru 195 000 kilomètres dans sa vie et il entendait faire respecter son âge, son expérience et ses petites habitudes.    (p 91 – 92)

Livre lu dans le cadre de Québec en septembre (LC autour de Jacques Poulin) organisé par Karine et Yueyin

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Cette lecture rentre aussi dans le cadre du challenge Francophone de Denis

challenge LittFrancophone

Et celui du Commonwealth d’Alexandra

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20 réflexions au sujet de « Volkswagen Blues – Jacques Poulin »

  1. Peut être aussi n’as tu pas accroché parce que les road trips sont typiquement nord-américains, liés à ces grands espaces que nous ne connaissons pas, et à la théorie, toujours forte Outre-Atlantique, que l’on s’en démarque ou s’en inspire, de la wilderness conceptualisée par Whitman et devenue mythique. Jacques Poulin reprend donc ici une forme littéraire, magnifiée par Kerouac et d’autres, portée à l’écran et aux yeux du monde par Into the Wild, mais qui ne correspond vraiment pas à nos formes littéraires traditionnelles.

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