Voilà un livre étonnant …Et déroutant….Tout d’abord, on découvre Xavier, un jeune garçon, errant tout seul dans New York dans les années 1920. Il dit venir de Hongrie où sa soeur Justine est restée. Pour survivre, il fait partie, en tant qu’apprenti, d’une équipe de démolition. Car New-York est en pleine mutation : Des immeubles sont détruits et leurs habitants expulsés, de nouveaux immeubles sont construits. Tout cela a l’air bien anarchique et peu organisé… une drôle d’époque ….Pas de protection sociale, la loi du plus fort prédomine, les gens se retrouvent à la rue du jour au lendemain…
En plus de Xavier, les autres personnages cherchent leur place : que ce soit Peggy sa jeune voisine qui essaie de l’aider, Lazare le contremaître qui glisse doucement vers la folie ou Le Philosophe, un vieil homme qui a pris Xavier sous son aile sur le chantier où celui ci est harcelé…Sans compter la grenouille qui joue du banjo (si vous n’êtes pas prêt à croire à une grenouille qui chante et joue du banjo dans un monde par ailleurs très réel, alors passez votre chemin…)
Au départ le livre est un peu long à démarrer, dans les 50 premières pages on se demande où on va arriver, du coup j’ai fait l’Erreur Fatale : j’ai lu la quatrième de couverture. Pourtant je m’étais jurée de ne plus jamais lire une quatrième de couv’ et là la Rechute : la quatrième raconte tout !! jusqu’à la page de 200 (sur 400) : Catastrophe, j’attendais ce que la quatrième disait qui allait arriver. Ça m’apprendra à ne pas respecter LE précepte « Tu ne liras jamais la quatrième de couve »
Ce petit inconvénient passé, à partir de la page 200, je suis réellement entrée dans l’histoire pour ne plus la lâcher : je l’ai trouvé passionnante : Xavier gagne en épaisseur, je l’ai trouvé tour à tour naïf, excessivement intelligent, pudique à la limite de l’obsession, charmant et tête à claque.
Après le milieu de la démolition qui est magnifiquement décrite, Gaëtan Soucy nous invite dans le milieu du music-hall avec l’autruche de la couverture et avec des phénomènes de foire. Au milieu de tout ça nous retrouvons Xavier et sa grenouille ….
La fin est absolument splendide, totalement inattendue et crédible (enfin si vous croyez aux grenouilles qui jouent du banjo – ce qui est mon cas)
Un extrait :
Lazare s’engage plus profondément dans la venelle. Odeur de vidange et de fruits pourris, d’huile rance. Flaques gluantes qui font crisser les semelles. Culs d’usines, entrepôts et garages, camions à la benne vide, rouille, souillures. Il croise un palefrenier en train de fouiller dans les appétissantes. Son cheval se tient, patient, à ses côtés ; la charrette est comble d’ordures. Le guenillou. C’est ce qu’il a répondu l’hiver dernier au médecin de la clinique qui lui demandait quel était son plus ancien souvenir, à lui Lazare. Le guenillou. La fois qu’il avait été écrasé par le cheval du guenillou. Il avait cinq ans. Il y avait les taches rouges des salicaires, de l’autre côté du chemin, qui l’appelaient comme un chœur d’anges. Sa mère eut un moment de distraction et le petit Lazare se précipita en riant vers les fleurs. Le cheval arriva en trombe, fracassant, occupant tout l’espace. Lazare ressentit ce que doit ressentir une alouette qui s’écrase contre une vitre. Il eut la clavicule cassée, les jambes rompues. Il s’évanouit en éprouvant une sensation d’une extraordinaire intensité, comme s’il venait d’être foudroyé de bonheur.
Le billet chez Karine qui m’a convaincue de lire ce livre et où vous pourrez découvrir le nom de la grenouille (je ne suis pas arrivée à l’écrire pour ce billet :-))