Voilà un livre qui vaut le détour (livre recommandé par Ingannmic, son avis ici)
D’abord j’ai adoré la forme : un journal d’un écrivain américain qui livre à la fois ses impressions sur l’écriture et l’art et qui nous fait partager son quotidien : ses relations avec sa mère atteinte d’Alzheimer, ses relations avec ses frère et sœur, son éditeur, ses relations sentimentales …
Thelonious Monk Ellison (Monk pour ses amis) est un écrivain qui a publié des analyses érudites sur des auteurs grecs ou sur le « nouveau roman ».
Aux Usa, il a peu de succès car le fait qu’il soit noir fait que le public attend de lui une certaine littérature (une littérature « noire , comprenez : qui mette en avant des «noirs»)
J’ai la peau noire, les cheveux frisés, le nez épaté, certains de mes ancêtres étaient esclaves et j’ai été gardé à vue par des policiers pâlots dans le New Hampshire, l’Arizona et en Géorgie ; selon la société dans laquelle je vis, donc, je suis noir ; c’est ma race.
Un jour, il lit un extrait d’un livre (atroce) d’une femme noire « Not’ vie à nous au ghetto» et rédige une parodie (parodie qui est présente intégralement dans le livre), ce livre compte tout attente devient un best seller, et Monk se retrouve confronté à un cruel dilemme : perdre son honneur ou ne pas pouvoir subvenir aux besoins de sa mère dépendante..
Ce que j’ai le plus aimé dans ce livre est bien la surprise. On passe d’un épisode « réel » de l’auteur avec sa mère avec une discussion fictive (ou pas) entre Hitler et Eckhart («Souvenez vous que vous êtes allemand. Gardez notre sang pur ») puis un épisode réel puis une discussion fictive (ou pas) de Rothko et Alain Resnais… sur la valeur artistique des rectangles, De Kooning et Rauschenberg sur la notion d’effacement du titre….
Puis on revient à des souvenirs d’enfance et de ce qu’il a vécu à 10 ans. Cela pourrait semble un peu foutoir mais pas du tout : La transition entre tous ses « moments » est facilité par la typographie. A chaque changement de narration, le lecteur est « prévenu » par trois croix.
Bref, tout m’a plu dans ce livre le fonds et la forme, l’écrivain pris entre ses convictions sur le fait qu’un écrivain peut écrire sur tout et pas seulement sur le milieu d’où il vient et la dure réalité de la vie quotidienne.
J’ai eu un peu peur au début de ne pas arriver à finir (je n’ai pas compris un seul mot de la conférence sur le « nouveau roman » mais je crois que c’était fait exprès).
Autre tout petit bémol : le style de « Pataulogie », le livre dans le livre, est très « grossier », dans le sens bourré de clichés (étonnant que les lecteurs américains n’aient pas vu qu’il s’agissait d’une parodie tellement c’est gros!!!)…donc 80 pages un petit peu longuettes… mais si ce faux « livre » n’avait pas été inclus, il est presque certain que j’aurais regretté qu’il n’y soit pas….
Le point principal est qu’il remet en cause tous nos préjugés : En refermant ce livre, je m’aperçois que j’avais un préjugé sur ce livre : En voyant la couverture, et sans avoir lu la quatrième, je m’étais imaginé que le sujet était l’histoire d’un homme noir dans le couloir de la mort (qui allait donc être effacé)…Etrange non, ce préjugé juste sur la couverture?
En bref une excellente lecture qui réussit à mêler écriture, racisme, préjugés en tout genre , coming out, droit à l’avortement , Alzheimer et art sans paraître complètement superficiel …
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Livre recommandé par Ingannmic dans le cadre du « challenge 12 amis – 12 livres »
Chez Loupiot et chez son ami Tom, de La Voix du Livre et aussi ici
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Bon, là, du coup, je ne sais plus… Allez, je me le note et je verrai bien ! 😉
Le premier quart ne m’a pas emballé … après si !!
Bonne semaine Lydia
Bonne semaine à toi aussi, Val !
💚
là, je suis tenté ; c’est épais comment ?
370 pages à peu près 🙂
bises Carnetspaseffacés 🙂
Je ne connais pas du tout, mais tu me donnerais bien envie de le lire.
Bonne semaine.
Tu me diras si tu le lis 🙂
C’est curieux ce besoin d’être rassuré par le connu. Pour peu qu’une personne s’écarte de ce qu’habituellement « on » attend ou imagine d’elle, ou croit qu’elle est, cela déconcerte à ce point que cette personne ne peut être reconnue pour ce qu’elle est véritablement. C’est là qu’on mesure la capacité d’enfermement des regards que l’ensemble ou la majorité porte sur ce qui est couramment admis, et qui rentre dans les cases.
Carnets, dans ta critique de l’agenda ironique de février, tu avais déjà abordé cette dimension sous un autre angle.
Ce qui n’est pas encore détecté, identifié, et nommé comme tel ne peut être reconnu par ceux qui n’en ont pas idée. Voilà où chacun d’entre nous est. La perception d’un point de vue nouveau n’est pas une mince affaire. Vaste sujet que celui de l’entendement. Je crois que ce livre est un exemple de ce phénomène.
J’ai apprécié découvrir cet auteur. Merci Valentyne.
Coucou Jo 🙂
Ravie si cette découverte t’a plu 🙂
Il y a quelques dialogues surréalistes qui ne sont pas piqués des verts 🙂
Je t’embrasse 🙂
Je suis ravie ! C’est l’un de mes livres préférés, pour toutes les raisons que tu développes dans ton billet. Everett a écrit d’autres excellents romans, mais celui-ci est à mon avis son meilleur.
Je vais bientôt voir à la bibli s’il y en a d’autres de l’auteur 🙂
Bisessss
Je n’ai lu qu’un roman de Percival Everett, Désert américain, et je m’étais promis d’en lire d’autres… mais le temps passe. Je note celui-ci !
Je note « désert américain » 🙂
Mais pas pour tout de suite , j’ai remarqué qu’après un livre d’un auteur enthousiasmant , il fallait faire une pause faute de saturation sinon 🙂
Bonne journée 🙂
Houla, non, celui-ci ne sera pas pour moi 😀 😀
Dommage que je ne t’aie pas convaincu , il est très bien ce livre 🙂
Bises Mind 🙂
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