Maintenant ou jamais – Joseph O’Connor

maintenant ou jamais

LC avec Edualc

Robbie et Fran se rencontrent sur les bancs de l’université à Luton (45 mn de train de Londres donc sur une autre planète)
Pourquoi deviennent-il amis ? peut être parce qu’ils sont différents des autres étudiants : Robbie est né en Irlande, Fran (Francis Mulvey) est né au Vietnam et a été adopté tout petit en Angleterre. Robbie joue  de la guitare, Fran se déhanche et a une voix hors du commun.

1985 en Angleterre, c’est la crise, le bras de fer entre Margaret Thatcher et les syndicats, c’est aussi le punk et encore le rock, les soirées étudiantes …

Au delà de la musique (je dois avouer connaître à peu près une chanson sur 10 parmi celles citées) j’ai beaucoup apprécié l’histoire et les personnages : Robbie le narrateur, Fran le génie fantasque, Trez la musicienne accomplie, Sean son frère jumeau solide et toujours de bonne humeur.
C’est l’histoire de ce groupe de jeunes adultes qui se forment et essaient d’être créatifs tout en restant fidèles à leurs idoles du rock.
Sur un rythme entraînant, j’ai vécu leur expérience des concerts et des tournées, apprécié leur début de la célébrité à Londres. Célébrité à peine esquissée qu’ils perdent sur un malheureux concours de circonstance, alors les quatre amis décident de recommencer à New York : au bout de deux ans de galères, le groupe « Ships in the night » décolle (bien vu pour des « bateaux » non ?) et rencontre un succès planétaire.
La rapide descente aux enfers pour Robbie et Fran (alcool, drogues) est plus attendue et ira jusqu’à l’éclatement du groupe et au procès. Cela m’ a attristée, j’avais l’impression de les avoir toujours connus, Robbie reste attaché à l’esprit de groupe alors que Fran veut poursuivre sa carrière en solo.
Les deux principaux personnages ont du mal à se remettre de leur enfance (perte de sa sœur lorsqu’elle avait sept ans pour le premier, enfance maltraitée pour Fran lors de sa première adoption)

J’ai aussi beaucoup aimé la deuxième partie plus courte où Robbie prend du recul et revient sur leur parcours 30 ans auparavant : en 2012 Sean, Trez et Robbie font un concert auquel Fran refuse de participer mais qu’il saura saluer à sa façon.
C’es Robbie le narrateur principal mais il laisse parfois la parole à Trez  et Sean pour qui la musique n’est pas le centre du monde.
La vision exclusivement « extérieure » de l’énigmatique Fran, devenue une vedette planétaire en solo alors que Robbie devient ruiné, rajoute du sel à la légende : Qui est réellement Fran ?

Un extrait :

À seize ans, il est parti en stop vers le sud, il dormait n’importe où, il a mendié ou a volé du côté de Boston dans le Lincolnshire, avant de descendre vers le Bedfordshire, où il espérait trouver du travail dans une exploitation agricole. Une employée de la bibliothèque de Luton l’a surpris qui volait un livre. Pleine de compassion, elle n’a pas appelé la police, lui a donné l’argent pour qu’il s’achète à manger, l’a aidé à faire une demande d’aide sociale et l’a encouragé à s’inscrire à la fac. Elle l’a poussé à reprendre contact avec ses parents adoptifs à Rotherham, mais il a refusé. Il ne m’a jamais parlé d’eux en termes négatifs, il employait toujours le passé. Ils étaient de Cong, un village du comté de Mayo, ils l’y avaient amené un jour en vacances, l’année de ses douze ans. Cong, c’est beau, disait-il. Les gens « parlaient doucement ». Ils se montraient gentils avec ce garçon apeuré qui ne ressemblait pas à leurs enfants, mais portait néanmoins un nom irlandais. Ils l’ont laissé traire leurs vaches. L’ont emmené dans les tourbières. « Tu es un grand petit homme, et Dieu t’aime » Parfois, les enfants de Cong le regardaient bizarrement, mais ce n’était jamais méchant, non, jamais. Il  était clair que ces quelques jours avaient compté pour Fran, qu’il s’y accrochait comme à l’un des ses rares souvenirs de paix sereine, qu’il leur savait gré  et que d’une certaine manière il en était fier. Des années plus tard, quand les journalistes stupéfaits demandaient de définir sa nationalité, il répondait parfois : « Viet Cong ».

Je dois ici présenter des excuses aux spécialistes qui ont eu pour corvée de me dégrossir le cerveau. Ils méritaient mieux que mes pitoyables efforts. Notre professeur d’anglais était le romancier Seamus Price, et ma tutrice en sociologie l’incomparable Amina Ali, une femme d’une telle culture et d’une gentillesse si pleine de tact que les mots me manquent pour décrire ce que j’ai gaspillé. Je m’incline devant le bourreau du désert des occasions manquées, mais j’ai promis d’être honnête dans cette chronique de mes crimes. Je ne rendais pas mes dissertations. Je n’assistais pas aux TD. La bibliothèque, pourvue du chauffage central, si bien garnie fût-elle, ne fut guère troublée par ma présence malodorante. Si je devais tout recommencer, je ne suis pas certain que je ferais différemment car j’avais en moi une tristesse qui me poussait vers la musique, alors que voulez-vous faire quand vous êtes ainsi porté ?

Très vite, j’ai compris que la seule raison pour laquelle je me rendais chaque jour à la fac, c’était pour jouer de la guitare, écouter chanter Francis Mulvey et, si nous étions en fonds, nous pinter la gueule.

J’ai hâte de lire ce que Edualc a noté 😉

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Lire le monde chez Sandrine (Irlande)

12 réflexions au sujet de « Maintenant ou jamais – Joseph O’Connor »

  1. Hello Val. Très heureux de ta réaction. Tu sais que j’adore cet écrivain et que ce livre m’a enthousiasmé. Pour ses grandes qualités bien sûr. Et aussi parce que, l’ayant un tout petit peu vécue, l’expérience d’un groupe rock, avec ses copains et ses 18 ans, a été pour moi quelque chose d’essentiel et de fondateur. Probablement l’un des meilleurs passages de ma vie. A bientôt, c’est toujours avec plaisir que je lis la même chose que toi. Bises.

  2. Je l’ai lu il y a peu de temps. Il y a effectivement un moment au milieu de livre où j’ai trouvé des longueurs ( en fait on revit un peu les mêmes choses en Irlande puis aux Etats-Unis). La dernière partie est effectivement plus intense. Cela reste dans l’ensemble un très bon roman sur l’amitié et l’univers musical.

    • L’amitié y est effectivement très forte même si ce n’est pas la même définition pour Robbie et Fran … En même temps c’est normal de changer et de s’éloigner parfois …
      Bonne soirée Jostein 🙂

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