Québec 1930 – Gabrielle file le parfait amour avec Edward, son mari, et élève avec lui leurs cinq enfants dans un Québec qui s’enfonce dans la crise. Lui est avocat et elle s’occupe des enfants. Marie Laberge nous emmène dans leur quotidien, toujours intéressant avec comme trame de fonds le Canada, très catholique, où ce sont les hommes qui décident de tout, où les jeunes filles ne peuvent qu’obéir et accepter les mariages arrangés par leurs parents. Une femme n’a aucun droit à part obéir et se confesser, les couples sont le plus souvent mal assortis (sauf Gabrielle et Edward toujours très amoureux après dix ans de mariage et qui « placotent » tendrement le soir) .
Leurs cinq enfants m’ont bien fait rire par leur réparties : Adélaïde, l’obstinée et la plus généreuse, Béatrice la coquette et les trois « petits » Fabien, Guillaume et Rose. Edward n’est pas un pur québécois (père ayant vécu aux Etats-Unis et mère d’origine Irlandaise) et apporte donc beaucoup de recul sur cette société, plutôt guindée et affreusement machiste ! Entourée de ses soeurs, Germaine la « vieille fille » et Georgina – dont le mari fait faillite en ce début de décennie et qui cherche désespérément à marier sa fille Reine – Gabrielle s’occupe de sa famille et vient aussi en soutien des plus démunis.
J’ai adoré tous ces personnages, tous bien campés et humains dans leurs forces et leurs faiblesses : Nic l’ami fidèle et secrètement amoureux de Gabrielle, Paulette la suffragette qui essaie de convaincre Gabrielle du bien fondé de la contraception pour les plus pauvres, et aussi Florent l’enfant tuberculeux qu’ Adélaïde a pris sous son aile….
En conclusion : j’aurais été triste à la fin de ce livre si je ne savais pas retrouver bientôt tout ce petit monde dans les tomes 2 (Adélaïde) et tome 3 (Florent).
Le billet de Nadine qui m’a incité à commencer cette deuxième trilogie de l’été 😉
Deux extraits : la complicité d’Adélaïde et Florent
Le lendemain, ils se promènent toute la journée et Florent lui indique les tons, les couleurs. Sur la plage, il lui montre comment observer l’ensemble de la couleur et ensuite, en prenant chaque galet, il lui montre l’infinité des gris, des beiges, des blancs qui donnent l’ensemble apparemment d’une seule couleur. Parce qu’il la force à porter attention, Adélaïde se rend compte que pas une planche du mur de la grange, pas un brin de blé vert dans le champ n’a la couleur exacte de son voisin… et que l’harmonie provient de la parenté, mais aussi de la différence.
Un extrait sur L' »amour conjugal » :
Elle admet qu’il y a deux formes d’amour conjugal: celui prescrit par l’Église qui se base sur un mutuel respect et une soumission. C’est un amour qui peut durer longtemps pour autant que chacun honore ses engagements qui sont pour l’homme de subvenir aux besoins de la famille et pour la femme de pendre soin de cette famille, de s’y dévouer totalement. L’autre sorte d’amour conjugal n’est pas mentionné par l’Église, sauf quand il survient dans le péché, et c’est l’amour qui dépasse la bonne entente, c’est une attirance, un besoin incontrôlable d’être avec quelqu’un et avec lui seul. L’intimité qu’autorise le mariage ne fait que renforcer l’attirance , l’entente et l’amour. Ces mariages là sont souvent moins calmes parce qu’il y a beaucoup d’imprévus dans cette force. Gabrielle conclut que cette forme d’amour n’est pas essentielle à un bon mariage, mais que , quand elle arrive entre deux époux, c’est un grand bonheur.
Challenge Pavé de l’été chez Brize (610 pages), Québec en septembre chez Karine et Yueyin
Challenge Francophone chez Denis